Le 1er août prochain, l’opération Barkhane*** fêtera ses cinq années d’existence. Cinq années que cette opération, qui a succédé aux opérations Epervier et Serval, existe. Cinq années que plus de quatre mille soldats français sont déployés en permanence au cœur de la bande sahélo-saharienne et luttent âprement contre un ennemi qui prospère sur les terreaux fertiles de la pauvreté, de l’ignorance et de la prolifération des trafics illégaux en tous genres au cœur d’une région où les Etats démontrent leur défaillance un peu plus chaque jour.
Cette série d’articles se propose de rappeler les enjeux et les défis qui sont ceux de la force Barkhane avant de tenter de dresser un premier bilan de cette opération aux dimensions herculéennes et dans laquelle une nouvelle génération de soldats apprend chaque jour la dure réalité du métier des armes.

De l’aventure méhariste à la BSS
Barkhane prend pied dans une région qui s’étend a minima de Bamako à N’Djamena, soit la distance qui sépare Biarritz d’Istanbul. Traversant cinq pays (Mauritanie, Mali, Burkina Faso, Niger et Tchad), lesquels constituent la force du G5 sahel, Barkhane se situe sur le même périmètre que ce qui fut de 1895 à 1958 l’Afrique occidentale française (A.O.F). Au cœur de cet ancien « pré carré » français, où la France se dispute une influence économico militaire avec la Chine notamment, les soldats français ont pour mission d’empêcher la prolifération de zones de refuge pour les groupes armés terroristes (GAT).

Au cœur de la bande sahélo-saharienne (dite BSS), autrefois lieu d’inscription de l’aventure méhariste, l’armée française a réinvesti ses anciens forts coloniaux de Tessalit (Mali) à Madama (Niger) et vient tout récemment d’inaugurer une nouvelle base opérationnelle avancée tactique (BOAT) à proximité de la ville de Gossi, afin de contrôler au mieux les zones de ravitaillement des groupes djihadistes dans la région du Liptako-Gourma, nouveau haut lieu de confrontation entre d’une part, les membres de Barkhane associés aux forces du G5 sahel et d’autre part, les groupes armés djihadistes qui redoublent de violence dans la région. Si le Mali faisait figure autrefois de parent pauvre du G5 Sahel, le Burkina Faso est aujourd’hui au cœur de toutes les inquiétudes avec la multiplication des exactions contre la population civile et les symboles du pouvoir par les GAT au sein de la région du Gourma.

Aux « frontières » de Barkhane, on retrouve également une série d’Etats faillis – Libye, Soudan, RCA -, ou encore traversés par une crise de régime ou sécuritaire plus ou moins importante – Nigéria, Algérie, voire Côte d’Ivoire -. Ces éléments renforcent d’autant la présence djihadiste dans la BSS qui se nourrit de tous les trafics illégaux imaginables. Ainsi, la BSS se hisse désormais à la troisième place du podium des narco régions derrière l’Amérique latine et les pays du croissant d’or (Afghanistan, Pakistan, Iran), prise en étau entre la “Highway 10”, voie aéromaritime située entre l’Amérique du sud et le continent africain) et la corne de l’Afrique où l’héroïne transite du sud Soudan au Maroc. S’ajoutent à ce trafic de stupéfiant (cocaïne, héroïne, haschich) les flux illégaux d’armes, de cigarettes, de ressources naturelles, et, comble de l’abjection, d’êtres humains…

 

*** NDLR : Sur les opérations Barkhane et Serval, retrouvez nos reportages en BSS  parus dans notre revue, notamment >>>