Cette série d’articles “Portraits de réservistes” se propose de donner la parole à quelques réservistes de grades, d’armées ou de services différents via une série de sept questions. Elle se propose d’éclairer les choix qui motivent l’engagement au sein de la garde nationale de nos jours et de mieux connaître les hommes et les femmes qui composent la réserve d’aujourd’hui.

Commissaire de première classe de réserve Matthieu M.

1/ Pouvez-vous vous présenter succinctement ?

Matthieu M., 30 ans, diplômé d’une école supérieure de commerce en 2013 puis de l’université Paris Dauphine en partenariat avec l’Ecole nationale d’administration en 2014. La vision « gestion privée – gestion publique », que j’ai pu acquérir en formation initiale puis au travers de mes expériences professionnelles, m’a offert de nombreuses opportunités dans des administrations publiques telles que le musée du Louvre, le ministère des finances, le ministère de l’intérieur ou encore le ministère des armées. Actuellement, je suis inspecteur des finances publiques affecté au sein de la DGFiP et, au-delà de cet emploi principal, je consacre une partie de mon temps libre à la réserve opérationnelle, en tant que commissaire de 1ère classe, et à la dispense de cours en école supérieure de commerce.

2/ Quelles ont été vos motivations pour rejoindre la réserve opérationnelle ?

Ma principale source de motivation fût l’envie de changer de quotidien et de découvrir un environnement atypique. Cet objectif est aujourd’hui atteint car j’ai pu participer à des activités et à des missions que je n’aurais pas pu découvrir dans un autre environnement professionnel. Les missions qui m’ont été confiées ont toujours été enrichissantes d’un point de vue personnel tout comme d’un point de vue professionnel. En effet, j’ai pu rencontrer des militaires d’active que j’estime particulièrement et pour lesquels je suis prêt à m’investir pleinement. Ces derniers ont favorisé mon acculturation au travers d’une bienveillance très appréciable au moment de l’intégration, d’un partage de leurs expériences et d’un dialogue ouvert.

Désormais le contenu intrinsèque des missions est ma source de motivation première car les nouvelles missions qui me sont confiées me permettent de découvrir d’autres méthodes de travail, c’est à dire de savoir faire autrement, tout en apportant une expertise sur les domaines des finances et de la logistique. L’engagement dans la réserve opérationnelle est, de mon point de vue, intéressante tant pour le réserviste que pour le service-employeur. Il offre une flexibilité dans le déroulé des missions passionnantes et une responsabilité dans la conduite de celles-ci, une fois la confiance réciproque acquise.

3/ Depuis combien de temps servez-vous dans la réserve ?

Cela fait déjà 3 ans que je suis affecté au sein d’une entité rattachée à l’Etat-major des armées et je compte y rester bien plus longtemps !

Les missions avancent et se succèdent ; de nouvelles missions naissent et mon service-employeur me soumet des besoins que je traite volontiers dans une démarche d’amélioration continue.

 

4/ Quelle est votre disponibilité ?

J’essaye d’offrir entre 30 et 40 jours par an à la réserve opérationnelle. Pour cela, après avoir bénéficié des 5 jours d’autorisation d’absence que les employeurs doivent offrir à leurs employés réservistes, je prends sur mes jours de congés. Les besoins de mon service-employeur s’inscrivent à moyen terme, ce qui me permet de conduire des missions ponctuelles dans un délai raisonnable avec une réactivité et un préavis gérables. Le succès de mes missions contribue à rendre plus performante les activités de mon service militaire d’emploi et il permet de dégager du temps aux opérationnels, militaires d’active, qui peuvent ainsi se concentrer sur d’autres tâches. Au final, les missions sont adaptées à mon temps de présence et portent principalement sur la conduite et la mise en œuvre de changements plutôt que sur une suppléance des tâches quotidiennes.

 

5/ Est-il facile de concilier vie professionnelle, réserve opérationnelle et vie familiale ?

Certes, j’absorbe une masse importante de travail mais toutes mes fonctions parviennent à s’imbriquer : mes objectifs sont priorisés et tous mes livrables sont rendus dans les temps. Je planifie systématiquement une période de réserve dès qu’une échéance importante est passée au ministère des finances de sorte que mes missions de réserve soient transparentes pour mon principal employeur. A terme, j’envisage de privilégier la réserve opérationnelle à la dispense de cours au regard de l’intérêt des missions qui me sont confiées et de ce que je pense offrir à l’administration militaire. D’un point de vue familial, tout va pour le mieux ; ma conjointe étant cadre dans une entreprise privée, nous avons globalement les mêmes horaires. Faire de la réserve, c’est également l’occasion de donner une autre image de l’institution militaire à mes proches et de leur faire découvrir voire même de leur donner envie d’intégrer cet environnement parfois perçu comme étant clos.

6/ Qu’attendez-vous de votre engagement dans la réserve opérationnelle de premier niveau ?

Je souhaite avant tout que la réserve opérationnelle maintienne ma motivation, c’est à dire qu’elle me permette de poursuivre ma découverte de la diversité du ministère des armées et de ses opérations. La confiance, qui m’a été accordée suite aux succès de mes précédentes missions, conforte cette motivation et mon service employeur m’offre de nouvelles perspectives sur le plan professionnel comme sur le plan humain. J’ai la satisfaction d’être le référent de certaines thématiques et de certaines missions à forts enjeux pour mon service-employeur. J’ai également la satisfaction de constater que mon expertise est reconnue et que mes connaissances sont donc mises au service de l’intérêt général.

7/ Pour vous, quelle stratégie doit être adoptée pour favoriser une réserve interarmée d’excellence ?

J’espère que la réserve opérationnelle aura vocation à se moderniser et à offrir de nouvelles perspectives pour les jeunes intéressés par la conduite de missions ponctuelles dans leur domaine d’expertise. A mon sens, le ministère des armées a beaucoup à gagner en employant de manière ponctuelle des agents motivés qui souhaitent apporter une contribution adaptée et répondre aux besoins de l’institution militaire. Pour y parvenir, le ministère pourrait constituer un vivier d’experts qui seraient mis à disposition des services en fonction de leurs besoins ; une meilleure diffusion d’informations favoriserait ainsi la rencontre entre les réservistes et les employeurs potentiels. Contrairement à un emploi permanent, je ne pense pas que l’aspect financier soit un critère de motivation. Au final, des missions intrinsèquement intéressantes, une reconnaissance professionnelle qui se matérialiserait par l’obtention de décorations et de changements de grade, ainsi que la participation à des conférences seraient, à mon sens, les points d’attraction que l’institution militaire doit rechercher pour se constituer une réserve interarmée d’excellence capable d’intervenir ponctuellement et sur des thématiques complexes.

Propos recueillis par Romain Petit