Par Claude Corse – L’utilisation de la lampe tactique dans le cadre de l’intervention graduée

La lampe et son porte lampe peuvent avoir un rôle important en fonction de l’intervention. Il est préconisé de placer la lampe du côté réactif pour optimiser les fonctions de cet accessoire en fonction des cas de figure, tels que :

  • signalisation en situation de police en orientant la lampe vers l’arrière afin d’intensifier la fonction du gilet réfléchissant de l’agent
  • utilisation du halo de lumière indirecte pour la rédaction de notes
  • éclairage de l’objet d’une infraction sur les fauteurs de troubles ou contrevenants
  • éclairage de la ceinture et des poches d’un suspect dans l’obscurité en maintenant l’intensité lumineuse sur les mains du suspect tout en ayant la visualisation de son visage et de ses pieds
  • éclairage intensive du visage d’un suspect afin de créer une gêne, mais de conserver un visu sur ses mains.

La lampe peut aussi être utilisée comme un moyen pour faire déplacer une personne en l’éblouissant et en accompagnant le geste par des injonctions. Sur une personne agressive physiquement, l’usage de la lampe peut être un atout en matière d’esquive et de maintien à distance. Le jeu se fera en faisant un mouvement de poignet alternatif au niveau de son visage avec la lampe, dans le but de l’éblouir (Painting). Cette alternance crée un effet stroboscopique et déstabilise l’œil1. Des exercices adaptés combinant esquives et coordination de la lampe peuvent être utilisés. Le high spot de la lampe sera dirigé vers le centre masse de l’individu. Si ce dernier ne coopère pas et défie les injonctions de l’agent, la lumière sera orientée vers le visage en contrainte en faisant plusieurs balayages. Cet enchaînement se nomme Light check, suivi d’un Painting. Cette technique peut se réaliser aussi juste après un coup d’arrêt avec la main côté arme, avec ou sans arme.

Les blocages adaptés lorsque l’agresseur progresse vers l’agent à très courte distance peuvent-être suivis d’une couverture de l’agent – dite « flashing cover » – pour reprendre le dessus ou créer de la distance pour se mettre à l’abri. La lampe peut être mise à son étui et orientée pour libérer la main réactive à des fins d’utilisation de moyens de contention sur l’individu. Les lampes tactiques sont la plupart du temps dotées de cannelure leur permettant d’être par ailleurs utilisées comme armes contendantes pour percuter ou effectuer des points de pression, par exemple pour faire lâcher l’emprise d’un adversaire.

 

——– Note de bas de page ——–

 

1 Physiologie de l’œil et lumière : de manière générale, la lumière doit-elle être considérée comme une arme pour celui qui l’utilise dans le cadre de la défense. Pour pouvoir comprendre le pouvoir de la lumière sur l’être humain, il faut d’abord comprendre comment notre œil interagit avec le monde extérieur. Tout d’abord, notre champ de vision – ou champ visuel – est tout ce qui est vu par la personne à partir de son emplacement de travail : devant lui, de manière nette et à la périphérie, de manière imprécise. Il représente un cône d’environ 90° centré sur l’axe de vision. Il peut être facilement repéré en posant le regard sur un travail normal (le papier sur le bureau, la machine…) et en recherchant la position des bras à la limite de ce qui est vu de manière périphérique. Essentiel dans l’explication de l’effet de sidération produit par une attaque à la lampe : le phénomène d’adaptation. C’est la capacité de l’œil à passer d’une faible luminosité à une luminosité importante dans un temps très court. Au passage d’un milieu clair à un milieu sombre, l’œil doit s’adapter et vice et versa. Un exemple concret est le passage pour le conducteur d’un véhicule, d’un tunnel sombre à un ensoleillement direct, c’est-à-dire quand le contraste est très important. Lorsque les yeux doivent s’adapter régulièrement à ces différences d’intensité lumineuse, il en résulte une fatigue visuelle. Avec l’âge, l’œil a du mal à s’adapter et la pupille est plus lente à réagir. Les performances sont moins bonnes aussi au niveau du cerveau, organe central de la vision. Le cortex met plus de temps pour décoder l’information fournie par la rétine et interpréter le message.

C’est dans la rétine que se trouvent les photorécepteurs. Si on comparait un œil à un appareil photo, la rétine en serait le film. L’œil est un organe que nous utilisons généralement très mal, surtout la nuit. Il a en effet la faculté de bien voir la nuit, mais il a besoin d’un délai d’adaptation de plusieurs minutes (entre 10 et 15 minutes). Au cours de l’adaptation, la pupille s’ouvre, son diamètre s’agrandit, pouvant passer de 2 à 8 mm. Ce qui permet de faire passer, à pleine ouverture, environ 16 fois plus de lumière qu’en plein jour. Cette ouverture de la pupille n’est pas la seule adaptation à l’obscurité. La rétine contient aussi les cellules nerveuses qui communiquent au cerveau ce que les photorécepteurs “voient”. Il y a deux types de photorécepteurs impliqués dans la vision : les bâtonnets et les cônes. Les bâtonnets fonctionnent en présence de très peu de lumière. On les utilise pour la vision nocturne car il ne faut que très peu de particules de lumière (photons) pour les activer. Les bâtonnets ne détectent pas les couleurs, c’est pourquoi la nuit on voit seulement en tons de l’échelle des gris. Il y a plus de 100 millions de bâtonnets dans l’œil humain. Ils participent à l’évaluation des formes et des contrastes et servent à la vigilance. Ils sont utilisés en vision nocturne. Les cônes ont besoin de beaucoup plus de lumière pour fonctionner et ils servent à voir les couleurs. On a trois types de cônes : les bleus, les verts et les rouges. L’œil humain ne contient qu’environ 6 millions de cônes. Il y a surtout beaucoup de cônes dans la fovéa, la région du fond de l’œil qui nous permet de voir avec netteté et précision.

L’effet « mer de lumière »
Durant la phase d’adaptation, l’œil fabrique les bâtonnets. Ceux-ci sont irrémédiablement détruits si l’on est ébloui. En cas de forte lumière, lampe, tube luminescent, fenêtre, il faut reprendre l’adaptation nocturne au début… : c’est l’éblouissement, lequel peut être douloureux, comme un coup de phare en voiture, la douleur étant proportionnelle à la quantité de lumière émise. Nous nous retrouvons alors baignés dans une « mer de lumière » avec perte de repères complet. On peut repérer la source responsable de cet éblouissement direct en regardant la tâche tout en déplaçant au-dessus des yeux la main ou un papier dissimulant les sources de lumière. Cela permettra de déterminer quand la vision est la meilleure.

*** Pour une explication du fonctionnement de l’oeil, voir la source suivante dont est issu le schéma ci-dessus  >>> https://askabiologist.asu.edu/batonnets-et-cones

Illustration © Formation théorique G.T.P.I. BCP Arnaud Boisset GPM Thomas Broc, Police Municipale de Niort,  2017, telle que publiée sur >>> https://slideplayer.fr