QUELLES CONSEQUENCES POUR L’EUROPE et la FRANCE ?
Par le Général (2s) Jean-Patrick Gaviard, ancien chef des opérations des armées
*** Cet article a fait l’objet d’une publication dans Le Figaro du 26 janvier 2012 et est ici reproduit avec l’accord de son auteur.
27 février 2012 – Le président Barak Obama et son secrétaire à la Défense Leon Panetta ont présenté récemment aux forces armées américaines un véritable changement de vision stratégique. Le document de référence (1) énumère, avec volontarisme, les priorités des États-Unis pour le XXIe siècle. Face à un effort de rigueur budgétaire important (450 milliards de dollars d’économie, en dix ans), l’exécutif américain donne des directives précises à ses responsables militaires.
Ce document politique fondateur permet de dégager quatre grandes orientations stratégiques :
1/ le rééquilibrage (« rebalancing ») des efforts américains vers l’Asie du sud Est et le Moyen Orient ;
2/ le reformatage de leurs forces armées, sous les contraintes budgétaires, pour les rendre « agiles, flexibles, prêtes à l’emploi » tout en les dotant de « technologie de pointe » ;
3/ l’accent mis sur les capacités à maintenir prioritairement ou à développer pour faire face aux menaces régionales, en particulier, liées aux armes de destruction massives, à la cyber défense mais aussi (et c’est nouveau) de déni d’accès dans les espaces aériens, maritimes et spatiaux ;
4/ la relation rééquilibrée avec l’OTAN accompagnée d’une politique américaine d’investissements industriels en Europe pour développer ces nouvelles capacités.
Quelles conséquences pouvons-nous tirer de ce virage stratégique pour l’Europe et plus particulièrement la France ?
Au plan politique et diplomatique
Bien que ce document mette en exergue le maintien des relations des Américains avec l’OTAN, en particulier dans le cadre de l’article V, le rôle en retrait des forces américaines dans les opérations en Libye et leurs admonestations aux Européens à investir davantage dans leur défense démontrent que ces derniers souhaitent s’impliquer d’une manière « moins forte » dans l’Organisation de l’Atlantique Nord et laisser donc les Européens face à leurs responsabilités. La conséquence concrète de ce « désengagement partiel » américain permettrait de relancer l’idée poussée par la France d’une défense de l’Europe s’appuyant sur deux piliers : la Politique de sécurité et de défense commune (PSDC) et l’OTAN. À l’heure où plus d’intégration politique européenne fait son chemin, ne serait-il pas opportun de remettre sur la table ces propositions et relancer une Europe de la Défense, aujourd’hui bien en panne? Le corollaire d’une telle volonté consiste à rester attentif, malgré les difficultés budgétaires actuelles, aux efforts financiers à effectuer par les Européens dans ce domaine.