Par Laure Singla –  II.  Réflexions autour du renforcement du cadre existant en 2021 et des pnouvelles dispositions offertes à tous les militaires

A. Mise en lumière des nouvelles dispositions de recours à un médiateur non militaire

La nouveauté en 2018 réside dans la saisine possible amiablement d’un médiateur non militaire par le militaire demandeur. Ainsi en 2021, il faut d’abord distinguer le recours contentieux du recours non contentieux. Et ensuite la nature de la situation.

Dans le cadre de recours non contentieux, pour une question relative à sa situation personnelle comme professionnelle, tout militaire demandeur peut désormais déposer une demande de médiation :

  • soit auprés d’un des 6 inspecteurs généraux exercant la fonction de médiateur militaire( Art D. 3124-12 code de défense) pour toute question relative à sa situation personnelle, aux conditions d’exécution du service ou à la vie de la communauté.( Art D.4121-2 Al 1et 2 code de la défense)  sans en justifier le motif ;
  • soit auprés d’un médiateur non militaire, dans les conditions prévues aux articles L. 213-5 et L. 213-6 du code de justice administrative ( Art D. 4121-2 du code de la défense Al 3) et ce médiateur peut être le médiateur militaire, dont les modalités d’intervention sont fixées par arrêté du ministre de la défense.

 L’arrêté du 6 septembre 2018 précise que concernant le médiateur militaire, celui répond aux mêmes exigences que le médiateur civil : «  lorsque le différend est traité par la voie de la médiation, le médiateur recherche l’accord des parties et le formalise. Il informe chacune des parties en indiquant la date à laquelle est intervenu l’accord ou le refus de rentrer en médiation. Le médiateur peut déclarer la médiation terminée soit de sa propre initiative, soit à la demande de l’une des parties ou des deux. Il en informe les parties par un écrit qui indique la date de fin de la médiation. »

La différence entre les deux processus réside dans la finalisation du processus. En cas d’accord sur le principe d’une médiation, l’arrêté précise que « les états-majors, directions et services sollicités transmettent les éléments dont ils disposent dans un délai fixé par le médiateur militaire. ». Ce qui donne un grand pouvoir au médiateur militaire qui peut intervenir auprés de la hiérarchie pour faire accélérer la transmission des éléments. D’autre part, la médiation garde le caractère confidentiel maximal, le militaire demandeur pouvant se faire assister durant toute la phase de médiation « par un militaire en activité de son choix. ». Il n’est pas évoqué la place du conseil dans ce type de processus, ni de tout tiers non militaire. Enfin, l’arrêté précise que lorsque les parties parviennent à un accord, « le médiateur militaire le formalise par un écrit, qui comprend les signatures des parties et la sienne, et leur notifie. ». A la grande différence du médiateur administratif civil, le médiateur administratif militaire formalise lui même l’écrit de l’accord de médiation.

 

B.  Mise en lumière des nouvelles dispositions pour les recours contentieux et la place de  la commission des recours des militaires

Dans le cadre d’un recours contentieux formé par un militaire, il convient de distinguer s’il s’agit d’actes relatifs à sa situation personnelle ou pas.

  • Si le recours est exercé à l’encontre d’actes relatifs à sa situation personnelle, ce dernier doit être obligatoirement précédé d’un recours administratif préalable examiné par la commission des recours des militaires, placée auprès du ministre de la défense. Sous peine d’irrecevabilité ( Art R. 4125-1  du code de la défense, modifié par Décret n°2018-135 du 27 février 2018). Ce nouveau cadre précise que «  La médiation à l’initiative des parties prévue aux articles L. 213-5 et L. 213-6 du code de justice administrative ne peut être engagée si la décision contestée a fait l’objet du recours prévu au premier alinéa du I, sauf si le président de la commission a informé le militaire de l’incompétence de la commission, de la forclusion, ou du classement de son recours dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l’article R. 4125-2 ». Tout recours introduit « devant la commission au cours d’une procédure de médiation et portant sur l’objet même de la médiation met immédiatement fin à cette dernière et emporte déclaration que la médiation est terminée. La commission informe sans délai le médiateur de l’introduction du recours. »
  • Si le recours est exercé à l’encontre d’actes ou de décisions d’ordre professionnelle, les dispositions de l’article R. 4125-1 modifié ne sont pas applicables aux actes et décisions :
    « 1° Concernant le recrutement du militaire, l’exercice du pouvoir disciplinaire, ou pris en application de l’article L. 4139-15-1 ;
    2° Pris en application du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre et du code des pensions civiles et militaires de retraite ainsi que ceux qui relèvent de la procédure organisée par les articles 112 à 124 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique. »

Les délais impartis pour saisir la commission par lettre recommandée avec avis de réception sont de deux mois à compter de  la notification ou de la publication de l’acte contesté, ou de l’intervention d’une décision implicite de rejet d’une demande. (Art R.4125-2 code de la défense). Au delà des 2 mois, tout recours formé est entaché de forclusion. Ce délai est d’autre part interrompu dans le cas où les parties engagent une médiation dans les conditions prévues aux articles L. 213-5 et L. 213-6 du code de justice administrative. La lettre de saisine de la commission doit être annexée d’une copie de l’acte litigieux et de celle  de recours administratif implicitement rejeté. A défaut, le recours est réputé non recevable et notifié à l’interressé par le président de la commission.

Tout processus nécessite un temps d’adaptation. Concernant les retours sur la pratique de la médiation au sein de l’armée, il est nécessaire d’être indulgent et humble. La corrélation avec la pratique civile reste délicate et finalement inapropriée, car il faut prendre en compte le cadre ainsi que l’atmosphère et les enjeux, lesquels restent différents en terme de finalité pour le militaire demandeur du processus, comme pour la communauté militaire. Pour autant,  l’introduction de l’outil reste une stratégie opérationnelle génératrice de résilience  et d’adaptabilité sécuritaire pour toutes les chaînes de commandements et les unités.

 

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