Crédits photos © Gendarmerie nationale / Archives
Une interview du lieutenant-colonel Christophe Plourin, chef du bureau de l’ordre public à la Direction Générale de la Gendarmerie Nationale (DGGN).
Parfois critiquées pour leurs actions de Maintien de l’Ordre (MO), en particulier depuis les récents évènements qui ont entouré la contestation du barrage de Sivens (voir notre post), les forces de l’ordre (Police et Gendarmerie) sont pourtant employées dans un cadre légal d’engagement de maintien de l’ordre strictement établi. C’est ce cadre légal qui a permis au ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, de soutenir l’action des gendarmes mobiles et des CRS au cours des manifestations particulièrement violentes à Sivens.
Même si le maintien de l’ordre n’est pas une science exacte, « il existe une véritable science de l’ordre public en Gendarmerie », nous explique le colonel Christophe Plourin, chef du bureau de l’ordre public à la Direction Générale de la Gendarmerie Nationale (DGGN), en charge de la doctrine d’emploi en ordre public au sein de la Gendarmerie nationale. Depuis les mouvements sociaux qui secouaient le nord et l’est de la France au début du XXè siècle, la Gendarmerie s’intéresse au maintien de l’ordre. La spécialité est donc ancienne et très bien maîtrisée au sein de la Gendarmerie. Cela n’empêche pas des drames pouvant survenir dans des situations extrêmement délicates à gérer pour les forces de l’ordre.
« Nous avons tiré plusieurs grands principes d’actions de maintien de l’ordre consistant à accepter et encadrer un désordre temporaire et localisé », précise le lieutenant-colonel Plourin. Ce que les gendarmes et les policiers appellent plus communément le MO ne consiste pas seulement à placer des gendarmes mobiles ou des CRS face à des manifestants, étant la partie la plus visible de cette mission. « Cela passe aussi par une recherche de renseignement, l’application d’un principe de dissuasion pour montrer nos moyens sans avoir systématiquement à les employer, profiter de notre mobilité de manoeuvre pour intervenir rapidement, occuper le terrain ou encore appliquer une certaine distanciation physique vis-à-vis des manifestants potentiellement violents ». Cette dernière notion étant très française car les forces de l’ordre en France ne cherchent pas obligatoirement le contact avec les manifestants, contrairement à ce qui se pratique dans de nombreux autres pays.
Le cadre légal des manifestations oblige en France leurs organisateurs à être clairement identifiés par les autorités, celles-ci étant représentées par la préfecture de Police. Le ministre de l’Intérieur encadre strictement la bonne tenue de ces manifestations et la réponse des forces de l’ordre à y apporter en cas de débordement. A chaque fois, cette réponse est graduée car « il existe des doctrines d’emploi mais c’est à chaque fois l’analyse de la menace qui déclenche la mobilisation de moyens supplémentaires ».
On peut tout de même identifier trois grands types de manifestations. Les manifestations de faible intensité qui demandent uniquement la présence de gendarmes départementaux ou de policiers de la sécurité public. Les manifestations de moyenne intensité qui requièrent une évaluation des besoins produite en amont, la mobilisation de l’unité de coordination des forces mobiles et l’intervention de gendarmes du Centre de Planification et de Gestion de Crise (CPGC) auprès du commandant de groupement de Gendarmerie où se déroule cette manifestation.
Enfin, le niveau le plus haut, c’est celui de la manifestation de haute intensité. Ce niveau engage des moyens importants pour un évènement comme celui du 70e anniversaire du Débarquement, en Normandie, par exemple. Il ne s’agissait en l’occurence pas de gérer une manifestation mais d’assurer une bulle de sécurité autour d’un site bien précis. « A Sivens, nous étions plutôt entre le deuxième et le troisième niveau » confie le lieutenant-colonel Plourin. Des gendarmes du CPGC ont été déployés sur place pour coordonner l’action des forces de l’ordre avec les autorités administratives. Les autorités et le commandant de groupement sont ainsi en mesure de décider de l’emploi de nouveaux moyens en quelques heures voire en quelques minutes selon l’urgence de la situation.
En France, la Gendarmerie compte compte 11 200 gendarmes mobiles répartis entre 108 escadrons. Elle compte également un groupement blindé (GBGM), basé à Satory.