Par Linda Verghaghe – Surcharge cognitive: la comprendre et la gérer – Dernier volet de trois journées d’études à l’initiative du Centre de recherche des Écoles de Saint-Cyr Coëtquidan (CREC), consacrées au « soldat augmenté », une nouvelle rencontre s’est tenue le 20 mars 2024 à l’Ecole du Val-de-Grâce, à Paris1 .Après le sommeil et le stress, c’est la thématique de la « surcharge cognitive » du soldat sur le champ de bataille qui a cette fois été mise en exergue.

Au cœur de ce programme, élaboré conjointement avec l’Institut de recherche biomédicale des armées (IRBA), une question qui s’impose : les faiblesses physiologiques du combattant (fatigue, stress, ou encore saturation en informations, dont les origines sont multifactorielles), alors que celui-ci demeure au centre des dispositifs militaires, avec pour constat le risque de le voir constituer la principale source de vulnérabilité desdits dispositifs.

Introduite par le général Hervé de Courrèges, commandant l’Académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan (AMSCC), et associant de nombreux intervenants, la journée a démarré par une succession de témoignages relatifs à plusieurs théâtres d’opérations et émanant de différents profils d’opérateurs, sur l’impact de la surcharge cognitive sur le terrain. Pilote, JTAC, ou bien officier traitant, à l’image du colonel Arnaud Ruyant, qui a notamment été déployé lors de l’opération Sangaris, en République Centrafricaine.

 

Témoignage du colonel Arnaud Ruyant (au premier plan à gauche), Commandant des formations des élèves de l’Académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan (AMSCC),
qui a notamment été déployé en tant qu’officier traitant lors de l’opération Sangaris (République Centrafricaine) © Linda Verhaeghe

 

La connaissance et la maîtrise de soi apparaissent dans ce contexte un enjeu décisif. Pour le Commandant des formations des élèves de l’Académie militaire de Saint-Cyr Coëtquidan (AMSCC), « l’équilibre du soldat est un gage d’efficacité opérationnelle extrêmement important », soulignant l’aspect fondamental de la prise en considération des capacités cognitives dans le cadre du recrutement.

La suite de la journée d’études s’est davantage concentrée sur les facteurs qui conduisent à la surcharge cognitive, explicités par Françoise Darses, professeur des universités et chercheuse au sein du département Action et Cognition en situation opérationnelle à l’IRBA. Cette dernière a insisté sur la « plurifactorialité de la survenue de la surcharge cognitive » et sur le rapport déséquilibré entre « exigences » et « ressources » à l’origine du basculement chez l’opérateur en proie à ce phénomène.

Au regard de cela, ont été abordées les possibilités d’évaluation et de maitrise de tels mécanismes et donc en parallèle sur les outils permettant de maîtriser ces fragilités liées à la nature humaine.

  • D’une part au travers de la formation, en développant par exemple « la simulation, la sensibilisation aux facteurs humains et la préparation mentale », comme l’a souligné le capitaine de corvette Christophe Melet, chef du détachement Rafale du Centre d’expérimentation pratique de l’aéronavale (CEPA/10S).
  • D’autre part en mettant de la même manière à profit les solutions découlant de la « révolution technologique des Nanotechnologies, Biotechnologies, Informatique et des sciences de la Cognition » (NBIC), dont quelques unes ont été présentées sur stand par quelques industries, à l’image d’un système de monitoring de l’état de l’utilisateur pour les interactions homme-machine (IHMs) adaptatives, par Naval group.

Inmind-Vr, une start-up spécialisée en neurosciences, plus spécifiquement dans l’évaluation du facteur humain, propose quant à elle un logiciel polyvalent, le Vr-maze, ainsi que son expertise, permettant de mesurer et d’améliorer les compétences cognitives de professionnels évoluant en environnement dégradé, que ce soit en conditions réelles ou simulées (laboratoire, réalité virtuelle, salle immersive).

Dans l’assistance aussi, des porteurs de projets innovants, parmi lesquels le président-directeur général de la société Peripheral, Aymar de La Mettrie. Celui-ci conçoit des appareils technologiques déclenchant les mécanismes inconscients de l’attention, destinés à être intégrés sur les masques de protection dont sont équipés les utilisateurs potentiels. « Composés d’un système d’orientation GPS et de led, le principe est d’orienter le regard de l’utilisateur de manière intuitive », explique-t-il.

Cette nouvelle catégorie d’interface permet de guider l’utilisateur sans le couper de son environnement, ni augmenter se charge cognitive. Il s’avère ainsi possible d’aider à l’orientation et à la coordination d’opérateurs évoluant dans des conditions et contextes contraignants, impliquant de devoir faire face au bruit, au stress et à la surcharge cognitive : soldats, pompiers, gendarmes…

 

1  Voir la présentation de cette journée d’études >>> https://www.terre.defense.gouv.fr/crec/evenements/journee-detudes-surcharge-cognitive-comprendre-gerer

Photo 1 : conçu par Peripheral, cet objet technologique innovant a vocation d’apporter une aide à l’orientation, à la coordination et à la communication des opérateurs évoluant dans des environnements contraignants © Droits réservés