(Par Murielle Delaporte) – SERIE MCO AÉRONAUTIQUE : APPRENDRE À « VOLER EN ESCADRILLE » (IV)

Cette quatrième brève de notre série résume la présentation des panélistes de la Conférence inaugurale sur la transformation du MCO aéronautique1.

 

Un accompagnement DGA renforcé, un RETEX du MCO naval

Par Patrick PUYHABILIER, chef du Service MCO- DGA

Pour le « patron du MCO » au sein de la DGA, la réforme actuelle – réalisée parallèlement à celle de la DGA également en cours – ne change pas le périmètre d’action de cette dernière. La DGA est déjà impliquée dans les études et approches du MCO initiales, y compris dans ses aspects logistiques, ainsi que dans les premières années de mise en œuvre des contrats de MCO. Ce qui va changer en revanche sont les modes opératoires qui devraient être notamment impactés par les facteurs d’évolution suivants :

  • un dialogue renforcé entre acteurs doit permettre de sortir des réflexions en silos au profit d’une meilleure coordination d’amont en aval et tout au long du cycle de vie des équipements
  • l’évolution technologique entraîne une intervention croissante sur les matériels en service, afin de procéder au plus tôt aux upgrades capacitaires : cette modernisation par incrément doit se faire de façon optimale, afin d’intégrer le plus rapidement et le plus intelligemment possible les innovations, sans pour autant procéder à des immobilisations de matériels ;
  • un travail collaboratif important est nécessaire lors de la négociation des contrats pour donner aux industriels un rôle renforcé en les engageant sur la maintenabilité et les performances MCO et pour permettre à la DMAé de conduire les premières tranches MCO ;
  • l’accompagnement de la DGA va être renforcé à mesure que la DMAé va recruter davantage de personnels DGA et que de nouveaux viviers se créent notamment par le développement de nouvelles écoles dans le domaine du MCO aéronautique.
  • l’innovation doit être davantage intégrée en vue de gains en matière de MCO aéronautique, par exemple en ce qui concerne le développement de la maintenance prédictive : si les équipements sont dotés de capteurs et de puces, ce qui fait actuellement défaut est la capacité d’optimiser et de sécuriser l’exploitation des données recueillies.

Venant du monde naval, Patrick PUYHABILIER tire cinq enseignements majeurs de la création et du mode de fonctionnement du Service de soutien de la flotte (SSF) :

  • Disponibilité et maîtrise des coûts : un cercle vertueux. Le SSF a été établi dans un contexte similaire d’éparpillement de contrats très spécialisés. Le système a donc été simplifié à partir de 2003 avec le développement de contrats globaux, puis de « contrats globaux en disponibilité », avec un maître d’œuvre unique et couvrant l’ensemble des flottes. La maîtrise des coûts est intervenue à mesure que le taux de disponibilité a augmenté : celui-ci est passé de 55% en 2004 à 80% en 2018 permettant une baisse des coûts de l’ordre de 20% lors de chacune des deux grandes vagues de contractualisation qui ont eu lieu sur cette période ;
  • Une BITD[1] nourrie par l’intérêt que suscite le MCO. En quinze ans, une base industrielle stable s’est développée autour du MCO naval avec une vingtaine d’acteurs industriels, dont une demi-douzaine d’entre eux participe systématiquement à chaque appel d’offre. Les contrats tournent y compris sur les vieilles flottes. « Le MCO intéresse (…). Naval Group réalise 45% de son chiffre d’affaires dans les services, c’est-à-dire essentiellement dans le MCO, ce qui est très significatif », précisa-t-il ;
  • « Savoir attendre ». La responsabilisation des industriels passe par une maîtrise d’œuvre sur l’ensemble des tâches et un partage des risques équilibré: il est notamment prudent d’attendre que l’industriel connaisse mieux un équipement nouvellement mis en œuvre après une à deux visites de maintenance avant d’en contractualiser la maintenance.
  • Eviter de faire exploser les coûts de disponibilité. Pour le patron du MCO de la DGA, c’est à l’Etat d’acheter et de mettre à disposition de l’industriel les rechanges particulièrement chers.
  • Etre réaliste en matière d’application des pénalités. Il faut laisser aux industriels un délai de réaction pour qu’ils puissent être à même d’effectuer des réparations.

[1] BITD : base industrielle et technologique de défense

 

Photo SSF © www.colsbleus.fr

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1 Cette série – dont le titre fait référence à une expression utilisée par l’un des participants, Frédéric Sutter –  reprend les actes du séminaire qui s’est tenu pendant deux jours sur la BA 106 de Bordeaux-Mérignac les 26 et 27 septembre 2018.

Composition de la conférence inaugurale sur la transformation du MCO aéronautique

(Modérateur Général (2S) LAURENT)

 

Avec :

  • Général de corps aérien Bruno PACCAGNINI, sous-chef Performance de l’Etat-major des armées ;
  • Ingénieur général de l’armement hors classe Monique LEGRAND-LARROCHE, directrice de la DMAé à l’EMA ;
  • Patrick PUYHABILIER, chef du Service MCO- DGA ;
  • Ingénieur général de l’armement Jean-Marc REBERT, directeur central du SIAé ;
  • Bruno CHEVALIER, directeur général du soutien militaire chez Dassault Aviation ;
  • Jean-Noël STOCK, vice-président, soutien client et services aviation militaire chez Thales ;
  • Alain ROLLAND, directeur centre soutien militaire chez Airbus hélicoptères ;
  • Didier DESNOYER, directeur division moteurs militaires chez Safran ;
  • Philippe ROCHET, président de Sabena Technics.