20-iii-2013 – L’analyse du…

Général (2s) Alain FAUPIN


Crédit photo: armes jihadistes, Gao, février 2013 (publiée dans Les Echos du 25/02/2013)



Il reste de très gros points durs sur lesquels notre engagement politico-militaire au Mali risque de buter.


1. Les otages.
Il ne s’agit pas d’un point mineur politiquement parlant; les otages sont aujourd’hui sciemment ignorés: priorité aux résultats militaires. Or l’expérience a montré que l’action armée, donc l’intransigeance ne donnait pas de meilleurs résultats que la négociation.Non qu’il faille préconiser le laxisme pour autant… D’autant, et la récente expérience camerounaise le montre, que des mouvances djihadistes voisines peuvent se charger d’en faire de nouveaux.

2. La sécurisation de l’arrière par la MISMA, une coalition de forces armées provenant de plusieurs Etats de la CEDEAO.
Cette étape bute déjà sur le financement et l’on peut émettre des doutes sur la capacité des Africains à ce stade de générer un état-major interallié et de se répartir les postes de commandement.

3. Le Mali n’est toujours pas un Etat de droit.
Le fait que le capitaine SANOGO soit toujours là et doté de fonctions liées à la défense est une menace en lui-même. C’est une condition sine qua non que nous aurions dû imposer au chef d’état malien avant d’intervenir que de nous remettre ce capitaine félon qui n’a fait que plonger ce pays dans l’anarchie et la défaite.

4. L‘autonomie des touaregs de l’Azaouad et le règlement de la question du Sahara occidental, réservoir inépuisable de jeunes djihadistes et un lieu de transit d’innombrables trafics entre l’Océan Atlantique et la Méditerranée.
Quand on voit l’énorme effort concédé par le Maroc pour la mise en valeur de ces territoires avec le but, internationalement reconnu, d’améliorer les conditions de vie et de développement des populations locales, on ne peut rester insensible à ces territoires non encore tout à fait sécurisés, du moins du côté algérien. Cette absence de règlement est directement préjudiciable aux opérations en cours au Sahel, contigu de ces territoires parcourus par les R’guibat Saheli et Sahraoui. Or le Polisario, création d’Alger pour faire pièce en son temps au Maroc et tenter de s’ouvrir une façade sur l’Atlantique, s’est distingué aux côtés de Kaddhafi en Libye et depuis en rapatriant au Sahara des tonnes d’armes et des personnels expérimentés qui, depuis, se sont …retournés contre les forces de sécurité algériennes. Le boomerang, en quelque sorte.

5. Le dernier écueil est celui du budget.
Combien de temps serons-nous capables, sans une collaboration financière extérieure de l’une des organisations internationales auxquelles nous appartenons, UE, OTAN, ONU, de fonctionner dans les deux domaines, militaire et politico militaire, au Sahel?

Il est certain , en tout état de cause, que la France fait là une démonstration très brillante de ses capacités et de sa grande proximité avec l’Afrique, la vraie. Cela permettra peut-être d’éviter que l’on considère le budget de la défense comme une variable d’ajustement (prochain livre blanc) et que l’on continue de philosopher vainement sur la ‘françafrique’. La France et l’Afrique ont des liens très étroits qui résisteront au temps et aux modes. Et qui sait si les Européens, dans un sursaut de lucidité ne viendront pas, une fois le plus gros du danger physique passé, appuyer notre action par des bonnes paroles et des mesures concrètes?