(Source: Ministère des Armées) – Nous reproduisons ci-dessous l’intégralité du discours de Florence Parly ministre des Armées, prononcé à l’occasion de l’ouverture du salon EUROSATORY le 11 juin 2018

– Seul le prononcé fait foi –

(…)

Eurosatory, ce n’est pas seulement un salon. Ce n’est pas seulement le centre d’exposition de nos armements terrestres, des technologies à venir : c’est le croisement de nos ambitions.

Notre ambition pour nos forces, engagées sur les théâtres d’opération comme sur le territoire nationales. Pour ces femmes et ces hommes, à qui je veux rendre hommage et qui se battent au quotidien pour notre sécurité, pour notre liberté.

Notre ambition pour les Armées, des Armées françaises qui entament une remontée en puissance exceptionnelle, qui renouvellent massivement leurs équipements et leurs matériels des plus petits au plus imposants.

Eurosatory, c’est une ambition pour notre innovation, pour des Armées résolument modernes, prêtes à affronter tous les ennemis et tous les modes de combat du XXIe siècle.

Ce salon, enfin, c’est notre ambition pour une coopération, pour une défense plus forte, plus rapide, plus performante, ensemble.

Ce n’est pas pour rien qu’Eurosatory est devenu un événement incontournable pour la communauté de défense, pas seulement en France ou en Europe, mais partout dans le monde. Ce n’est pas pour rien que, de partout, on se presse pour exposer et assister à ce qui est aujourd’hui le plus grand salon au monde pour la défense terrestre et aéroterrestre.

Je suis fière de me tenir ici, devant vous, fière de vous voir si nombreux, si enthousiastes. Fière de voir que le savoir-faire Français est connu et reconnu.

L’industrie de l’armement terrestre en France, ce sont 15 000 emplois directs, un réservoir exceptionnel d’emplois qualifiés, ce sont des embauches à venir, c’est un secteur vaste depuis le véhicule blindé jusqu’aux munitions, depuis les systèmes d’information et de communication jusqu’aux petits équipements de nos soldats.

L’industrie de l’armement terrestre, c’est le dynamisme, la recherche de l’excellence et de l’innovation. La part de l’armement terrestre dans nos exportations est en très forte augmentation. La gamme aéroterrestre est en plein essor. L’arrivée, cette année, du nouveau missile MMP suscite l’intérêt. Les innovations apportées par le programme de véhicules connectés SCORPION viennent enrichir, encore, notre offre d’équipements terrestres.

En somme, aujourd’hui, nul ne peut ignorer la France dans le domaine des armements terrestres et aéroterrestres.

Comme vous le savez la France a fait le choix d’une défense forte, complète, renouvelée. La loi de programmation militaire, adoptée à une très large majorité par l’Assemblée nationale et le Sénat l’affirme clairement : le renouveau de nos Armées commence.

Sur la période de la programmation, ce sont 295 milliards d’euros qui seront consacrés à nos Armées avec comme objectif de dédier, suivant l’engagement du Président de la République, 2% de notre PIB à la défense d’ici 2025. Et le renouvellement des équipements et des matériels est au coeur de cette LPM de choc, qui va permettre une remontée en puissance majeure de nos Armées.

Depuis des années, notre engagement opérationnel est majeur, nos équipements sont employés intensément et éprouvés dans des conditions souvent hostiles. Et dans ces conditions, bien souvent, quelle a été notre réponse ? Des programmes d’armement retardés, encore retardés et parfois annulés. C’était dangereux pour nos forces, dangereux pour notre supériorité opérationnelle : c’est fini.

Le programme SCORPION va être accéléré et le nombre des livraisons augmenté. D’ici 2025, la moitié des livraisons les plus stratégiques du programme seront effectuées.

SCORPION. Ce nom ne vous est pas inconnu.

C’est un programme exceptionnel par son ambition, sa cohérence et son ampleur. Grâce à Scorpion, les équipages sont mieux protégés et nous sommes en capacités de détecter plus vite nos adversaires et de riposter immédiatement. Avec SCORPION, c’est la première fois que sont développés en même temps, et dans un ensemble cohérent, des véhicules connectés, un système d’information et de communication, un système de préparation opérationnelle et tout leur système de soutien associé.

SCORPION, c’est l’implication de tous, du ministère comme des industriels, depuis le plus grand groupe jusqu’aux plus petites PME.

Grâce à la LPM, dans le cadre de SCORPION, ce sont 150 blindés véhicules blindés multi-rôles lourds, les GRIFFON, supplémentaires, portant leur cible à 1 872.

Ce sont 52 engins blindés de reconnaissance et de combat supplémentaires, pour une cible fixée à 300. Ces JAGUAR seront un appui précieux pour nos Armées. Ce sont des blindés modernes, adaptés à tous les terrains, capables d’atteindre plus de cibles, mieux équipés contre les mines ou les engins explosifs improvisés. C’est pourquoi je suis particulièrement fière que soit présenté dans ce salon et pour la première fois un exemplaire du JAGUAR.

Avec cette LPM, le programme SCORPION, ce sont aussi 420 VBMR Légers en plus, pour une cible augmentée à 978. Ces VBMR légers sont attendus impatiemment par nos Armées. Ils seront efficaces, protecteurs, innovants. Ils seront craints, je crois, et décisifs pour notre supériorité stratégique. A ces VBMR légers, il ne manquait rien, finalement, sauf un nom. Un nom, qui résonne comme une opération où l’Armée française a montré son savoir-faire et son audace. Un nom, qui rappelle un félin du désert, dextre, rapide et habile. C’est un honneur tout particulier, pour moi, de baptiser ces VBMR-Légers du nom de Serval et de le faire ici, à Eurosatory.

Ces équipements seront plus nombreux, plus modernes, mais ils devront aussi être plus disponibles. C’est une condition pour la qualité de nos entrainements et pour le succès de nos opérations. Et c’est pourquoi j’ai lancé un projet d’amélioration du MCO terrestre.

Je vous parle de ces gros matériels, mais je veux également vous parler des drones, qui sont l’exemple même d’équipements aéroterrestres de rupture, adaptés aux nouvelles menaces et aux nouveaux conflits.

Je peux vous parler, aussi, des petits équipements, si nécessaires à nos forces. Durant des années, ils ont été la variable d’ajustement de nos budgets, c’était inadmissible. Alors cette loi de programmation militaire, ce sont 55 000 gilets pare-balle nouvelle génération, dont 25 000 dès l’année prochaine, ce sont 43 000 nouveaux casques, ce sont des nouveaux treillis F3 ignifugés qui équiperont tous nos soldats en OPEX dès 2020 et 100% des forces en 2025.

Ces équipements, gros comme petits, nos Armées les attendent. Je sais que je pourrai que je pourrai compter sur chacun d’entre vous pour réussir, pour tenir les délais et offrir les meilleurs matériels possibles à nos forces.

Cette remontée en puissance exceptionnelle de nos Armées, c’est autant d’opportunités pour notre défense, pour nos forces, pour notre industrie. Ce sont des commandes supplémentaires. Ce sont des emplois supplémentaires. Ce sont aussi des sources d’innovation supplémentaires.

Car l’innovation doit être au coeur de notre action. C’est un de mes mantras, je ne vous le cache pas. Mais quand je parle à l’armée de Terre, je n’ai pas beaucoup de doutes : on comprend ce que ça veut dire « innover ».

Chacun, ici, qui s’est rendu à la rencontre de nos forces en France comme en OPEX le savent : il n’y a pas plus ingénieux qu’un soldat face à un problème. L’innovation, souvent, part de ces idées simples mais géniales, tirées des nécessités de l’entraînement ou du combat.

Cette innovation, elle part aussi de nos laboratoires, de nos start-up, de nos grands groupes. Nous sommes tous des acteurs de l’innovation et nous devons le rester.

La loi de programmation militaire prévoit un renforcement majeur de l’effort du ministère des Armées en matière de R&T. Le budget de la recherche et de l’innovation va être augmenté de plus d’un tiers, passant de 730 millions aujourd’hui à 1 milliard d’euros par an d’ici 2022. Et grâce à ces moyens nouveaux, nous allons pouvoir préparer pleinement les systèmes terrestres du futur comme le successeur du char Leclerc, l’artillerie du futur ou l’équipement du fantassin.

Dès cette année, l’armée de Terre va renforcer massivement ses capacités d’innovation en se structurant et en favorisant l’innovation sur tout le spectre.

Et quand je dis tout le spectre, ce n’est pas une figure de style : cela sera de l’innovation au travers des programmes, avec des évolutions de SCORPION sur les nouveaux objets, sur la robotique ou sur la création de données au niveau de l’état-major. Ce sera aussi de l’innovation de proximité, au plus près des régiments, pour organiser et mettre en réseau.

Ce sera une innovation du temps long, qui nourrira les études et les programmes du futur. Ce sera aussi, une innovation du temps court, de l’immédiat, avec la création du Battle Lab Terre, dédié à l’expérimentation rapide, à ce que l’on appelle les « boucles courtes », ou avec la transformation digitale et la création d’applications pour simplifier la vie quotidienne de nos soldats.

Nous allons nous tourner résolument vers les PME, nous allons nous tourner vers les start-up, vers cette économie civile que le ministère des Armées n’inspire pas forcément par essence et à qui nous devons dire : « n’ayez pas peur ». C’est d’ailleurs le sens même du Plan Action PME que j’ai présenté il y a deux semaines. Le sens du dispositif RAPID, du fonds d’investissement Definvest entre la DGA et Bpifrance. C’est le sens, enfin, de l’agence pour l’innovation de défense, qui va fédérer et animer tous nos efforts d’innovation.

C’est aussi une responsabilité que nous avons dans notre comportement à tous, ministère comme grands groupes. Si nous voulons attirer les meilleurs talents, les pépites technologiques, les PME et les ETI les plus innovantes, nous devons d’abord faire preuve d’ouverture et les respecter, les payer dans les délais, ne jamais donner le sentiment de les acculer ou de les mépriser.

Le ministère des Armées doit être plus ouvert sur l’innovation, sur l’audace. La DGA a réussi et réussit toujours d’immenses succès pour nos programmes d’armement. Je veux profiter de cette tribune pour rendre hommage à la qualité de ses ingénieurs, de ses chercheurs, de ses personnels. Nous pouvons compter sur vous et c’est un soutien précieux.

Mais dans un monde où les technologies changent en quelques mois, où les idées fusent et les talents s’exportent, nous ne pouvons pas risquer de nous cantonner dans des dispositifs trop orientés vers le long-terme. Dans des programmes, qui, une fois décidés, sont comme gravés dans le marbre. La DGA, c’est le long-terme, évidemment. C’est la planification, bien sûr, mais cela doit être aussi une capacité d’adaptation constante, une faculté à prendre en compte le changement, expérimenter vite. Cela doit être un accès facile pour tous, des processus d’acquisitions d’armement plus souples, une réactivité plus forte.

Il faut donc réformer la DGA et je voulais saluer l’engagement de Joël Barre pour mener à bien cette réforme que nous sommes en train de peaufiner et que je présenterai, en détail, très bientôt.

En commençant cette intervention, j’ai parlé de trois ambitions : la remontée en puissance de nos Armées, l’innovation et la coopération.

Mon action à la tête du ministère des Armées n’a de sens que parce qu’elle s’inscrit dans un objectif précis : préparer des Armées modernes pour répondre aux menaces d’aujourd’hui et de demain. Des Armées modernes, ce sont des armées fortes, avec des moyens supplémentaires et adaptés. Des Armées modernes, ce sont des Armées innovantes, audacieuses, à la pointe des nouvelles technologies. Des Armées modernes, enfin, ce sont des Armées qui coopèrent, qui assurent notre pleine autonomie stratégique mais dont l’horizon est européen.

Le morcellement du paysage industriel européen est un frein à notre développement. Il empêche les industries d’atteindre des tailles critiques, de pouvoir peser pleinement face à des concurrents américains et asiatiques toujours plus forts. Je ne vois aucun panache à tenter de survivre seul, quand nous pouvons réussir ensemble. Unir nos forces, c’est remporter des marchés, faire les meilleurs équipements au meilleur prix.

Cette construction d’une industrie européenne, nous l’avons entamée. Nexter et KMW en fondant KNDS ont montré une voie. Une voie prometteuse et qui permet à KNDS d’être aujourd’hui un acteur incontournable pour les programmes d’armement de demain comme le char lourd du futur, l’artillerie du futur avec, à la suite du CAESAR, le Common indirect fire system, le CIFS. Ce rapprochement industriel dit aussi beaucoup de l’ambition que nous avons avec l’Allemagne, avec laquelle nous partageons des programmes éminemment structurants pour nos armées de terre et pour l’avenir de notre défense.

Et il ne faut se contenter de bâtir des industries communes, il faut créer une grammaire des équipements. Nous ne pouvons nous contenter de dire qu’il faut des interventions communes, le répéter à l’envi, et continuer à avoir des équipements qui ne fonctionnent pas ensemble, qui ne se parlent pas, qui ne communiquent pas. Nos armements doivent se comprendre.

C’est ce que permettront les échanges technologiques et les programmes communs. Je pense en particulier à la coopération étroite que nous sommes en train d’édifier avec la Belgique dans le développement du programme de capacité motorisée.

Coopérations étatiques et coopérations industrielles vont de paire : ce sont des opportunités pour l’industrie et pour la recherche. C’est une nécessité pour notre défense, pour la protection de la France et de l’Europe.

Mesdames et messieurs, nous avons aujourd’hui toutes les cartes en main pour réussir. Je le sais, je le vois. Je le vois à travers votre vitalité, votre détermination. Je le vois à travers l’enthousiasme que suscite le salon Eurosatory.

Je le disais, ce salon est au croisement de tous les grands enjeux pour nos équipements terrestres et aéroterrestres, pour notre industrie, pour notre défense et, j’en suis sûre, il sera une nouvelle fois pleinement à la hauteur des enjeux.

Je vous remercie !

 

Photo © démonstration dynamique de l’armée de Terre pendant Eurosatory, M. Delaporte, 10 juin 2018