(Par Murielle Delaporte) – SERIE – 

I . MCO aéronautique : « L’équilibre parfait existe-t-il ?»

Cette série – dont le titre fait référence à une expression utilisée par l’un des participants, Frédéric Sutter –  reprend les actes du séminaire qui s’est tenu pendant deux jours sur la BA 106 de Bordeaux-Mérignac les 26 et 27 septembre 2018.

Nous commençons par une synthèse de l’introduction du Général Laurent, à l’origine de ce programme.

 

L’introduction du général de corps aérien (2S) Jean-Marc LAURENT

« Nommer justement les choses, c’est mieux les appréhender et les comprendre. Le maintien en condition opérationnelle ou MCO en est l’illustration parfaite. Jusqu’au tournant du siècle, l’appellation n’existait pas …». Ce sont par ces mots et une introduction sur la genèse d’un concept spécifique aux armées françaises que l’organisateur du Séminaire de l’ADS Show, le général de corps aérien (2S) Jean-Marc LAURENT, a lancé un programme de conférences particulièrement enrichissantes, réparties en cinq table-rondes et étalées sur les quarante-huit heures du rendez-vous biennal de la maintenance aéronautique militaire.

Afin d’expliquer l’évolution du concept récent de MCO à la française – difficilement traduisible en langue anglaise, car davantage interdisciplinaire que la notion de MRO par exemple (pour « Maintenance, Repair and Overhaul ») -, le Général LAURENT distingue trois grandes phases :

 La Guerre froide au cours de laquelle prédominait une vision différenciée d’acteurs dotés de cultures spécifiques : une période au cours de laquelle « l’importance des stocks masquait les lacunes d’un système raisonnant davantage en termes de consommation budgétaire que d’efficacité opérationnelle » ;

 Le Livre Blanc de 1994, qui, pour l’ancien commandant du soutien des forces aériennes (CSFA) entre 2011 et 2013, marque un tournant en faisant bouger les lignes vers une approche globale incluant le soutien : il est question pour la première fois de « programmation » et non plus seulement d’équipements… Y était notamment recommandée la constitution d’une « capacité logistique de haut niveau à confier à des personnels spécialisés dont la disponibilité [se devait d’être] la même que celle des forces à soutenir » ;

 Avec le triple effet de la professionnalisation des armées, de la baisse des dépenses militaires et de l’augmentation des opérations extérieures, la fin des années 90 signe cependant le glas du système de soutien existant : une nouvelle dynamique englobant tous les acteurs étatiques et industriels de la maintenance engendre un renouveau conceptuel et la naissance du MCO tel qu’on l’entend aujourd’hui. La création du SSF en 2006, puis de la SIMMAD, et un peu plus tard de la SIMMT, découle de ce changement de paradigme, selon lequel « le MCO se retrouve au centre des opérations et non plus comme un élément périphérique (…). On passe à une structure correspondant au raisonnement selon lequel ‘l’intendance suivra’ à des forces de soutien proactives et une intégration des opérateurs et des techniciens opérationnels. » Le Livre Blanc de 2008 souligne ainsi que le MCO conditionne la disponibilité et l’engagement des forces et cherche à intégrer encore davantage tous les acteurs et renforcer la cohérence entre les processus d’acquisition et de soutien des équipements en impliquant directement les industriels.

La centralisation à Bordeaux du CSFA, puis du CFA, ainsi que de la SIMMAD, relève de cette logique dont l’ADS Show – organisé sur un site militaire sous la houlette du Conseil régional d’Aquitaine – en est la manifestation. A l’heure où le Livre Blanc actuel prône un partage optimal entre l’Etat et l’industrie et où la ministre des Armées Florence Parly a lancé une réforme devant rénover les relations entre ces derniers, le Général LAURENT a rappelé la vocation finale du MCO, à savoir ses effets opérationnels qui sont de « voler, voler plus, voler pour combattre » et a lancé le débat de ces deux jours de séminaires en posant la question suivante : « si le MCO n’a certes pas encore atteint sa maturité, l’équilibre parfait existe-t-il ? »

Les articles, qui suivront cette introduction, reprennent l’essence des cinq table-rondes évoquées précédemment et apportent nombre de réponses, que nous vous invitons à découvrir au fil des semaines qui viennent.