Texte et photos par le Lieutenant-Colonel (R) Pascal Podlaziewiez
Créé en 1946, le centre de formation des techniciens de la sécurité de l’armée de l’Air est implanté au sein de la base aérienne 120 à Cazaux en Gironde. Héritier de l’école des pompiers de l’air, le centre est aujourd’hui la référence dans la formation, le maintien des acquis et l’entrainement des pompiers aéronautiques des trois armées mais travaille aussi en étroite relation avec les services interministériels, la sécurité civile et forme des stagiaires étrangers.
Ce centre est sous le commandement direct de la BAFSI (brigade aérienne des forces de sécurité et d’intervention). Sa mission est la formation et l’entrainement de tous les pompiers aéronautiques de l’armée de l’air ainsi que de la Marine Nationale et des pompiers de l’ALAT (aviation légère de l’armée de Terre) pour le service au quotidien sur les bases mais il est également en charge de la préparation opérationnelle avant projection des détachements de sécurité incendie déployés en opérations extérieures.
Pour remplir ses missions, le centre dispose d’une soixantaine de personnes spécialistes et experts dans les domaines de la lutte contre les feux et plus spécifiquement sur les interventions sur aéronefs militaires. Parmi ce personnel, on retrouve aussi une équipe administrative qui gère au quotidien les stagiaires et la vie du centre, des mécaniciens, des logisticiens et une équipe de commandos.
Le centre dispose également de moyens de formation très spécifiques et adaptés à la formation de ces soldats du feu. En effet, le centre dispose de divers simulateurs de feux permettant aux stagiaires d’être au plus près de la réalité à laquelle ils pourront être confrontés.
Un simulateur de feu localisé (SFL) permet de travailler les techniques d’intervention sur une partie de l’aéronef. Feu de réacteur, de turbopropulseur, de train d’atterrissage, de cockpit, de soute … Avec cette « maquette » le pompier est mis en situation sur des éléments particuliers de l’avion où il va mettre en œuvre les diverses techniques d’approche, de lutte et de sécurisation de l’aéronef.
Géré, contrôlé et suivi par des instructeurs dans une tour de contrôle, ces derniers activent à distance le feu (généré par des bruleurs à gaz), en contrôlent la localisation, la puissance, la durée, la réactivation si nécessaire et toujours sous la vigilance d’autres instructeurs au plus près des stagiaires.
Sur l’aire à feu le deuxième simulateur, très spectaculaire est le SCR (simulateur de carburant répandu). Sur une aire, se trouve une maquette d’avion de combat que les instructeurs peuvent enflammer en partie ou totalement, avec plus ou moins d’intensité, toujours sous contrôle afin de permettre au groupe d ‘intervention de se former aux techniques particulières d’interventions sur un avion armé qui pour diverses raisons aurait pu prendre feu ou pour porter secours à l’équipage dans le cockpit.
Le groupe mis en alerte, rejoint la zone du « crash Fire » déploie ses deux camions de lutte incendie et en cas de feu attaque immédiatement ce début d’incendie grâce à ses canons à mousse pilotés de l’intérieur du VMA (véhicule mousse aérodrome) avant que les pompiers interviennent au plus près avec des lances afin soit de refroidir des zones soit d’éteindre des feux résiduels et avant d’intervenir et de porter secours sur le personnel de l’avion. Un troisième véhicule (véhicule de sauvetage) emporte lui tous les accessoires nécessaires au sauvetage : coussins gonflables permettant de lever l’appareil ou de sécuriser sa position, pinces hydrauliques de désincarcération dont la puissance est de 700 bars dotées notamment de mâchoires spécifiques qui permet de couper les éléments « métalliques » de la structure de façon nette et sans écrasement, échelles pour accéder au cockpit ou monter dans l’aéronef et d’autres accessoires indispensables aux interventions.
Sur un autre endroit se trouve également une zone de travail en espace confiné où les pompiers s’entrainement aux interventions en milieu dégradé (fumée, chaleur, obscurité).
Tous ces entrainements font l’objet non seulement d’un suivi attentif des formateurs durant les phases des exercices mais chaque exercice est débriefé dès la fin afin d’améliorer les savoir-faire du personnel.
Depuis peu, le centre bénéficie de l’aide à l’innovation quant à un projet de simulation afin de permettre aux stagiaires de travailler sur un téléphone, une tablette ou un ordinateur dans deux domaines :
*l’aisance à la mise en œuvre et la gestion de VMA : cette application permet au stagiaire de se familiariser avec la console de contrôle du canon et de son joystick en gérant sa manipulation mais aussi le débit, la consommation en eau et en mousse …Cela a pour but outre le drill partout et tout le temps des opérateurs, de faire une économie dans la consommation de l’eau mais sur le vecteur pas de consommation de carburant, pas de potentiel utilisé, pas de maintenance…
*la base en 3D : GIS gestion d’intervention simulée. Il s’agit sur une modélisation d’une base aérienne de gérer tous types d’interventions d’un groupe de secours à partir de l’alerte. Les véhicules eux aussi modélisés, sont animés sur ce simulateur. Le conducteur du VMA par exemple, doit conduire son véhicule sur la base vers le lieu de l’intervention en suivant les cheminements, positionner son véhicule et commencer l’attaque du feu. Le pilotage du camion se fait dans des conditions très proches du réel avec les accélérations, le freinage, la gestion du gabarit… comme dans la réalité
Ces experts forment annuellement plus de 1500 stagiaires soit initiaux soit en maintien des compétences. Par an ce sont environ 500 militaires dont 10% de femmes qui sont formés en « initial ». Qu’ils soient jeunes engagés militaire du rang, jeunes sous-officiers en sortie de Rochefort ou officiers sous contrat spécialistes, tous passent par le centre afin d’acquérir les premiers sacrements du pompier de l’air. Cette formation dure pour un militaire du rang 8 semaines, pour un sous-officier et un OSC 8 mois. Les actions de formation sont au nombre de 37 (premier secours, feux, prévention, techniques, conduite tout terrain et tout chemin…)
Mais cette formation n’est pas une fin en soi. Affecté dans un escadron de sécurité incendie et sauvetage d’une base, c’est au quotidien que ce pompier va continuer à se former et s’entrainer. Pas un jour sans formation. Ce maintien des compétences est également contrôlé et validé annuellement par le CFTSAA. Dans ce cadre le centre valide les compétences de plus de 800 pompiers par an avec près de 50 sessions.
Des experts des techniques de combat sont par ailleurs affectés afin de remplir la mission de préparation avant la projection des pompiers qui vont servir en opérations extérieures sur des bases aériennes. Les pompiers projetés peuvent eux aussi être confrontés au plus près à l’ennemi sur la zone de déploiement. Afin d’être prêts, ces militaires revoient avec ces commandos les techniques de tirs, de combat, de lutte contre IED et autres actes du combattant indispensables avant une projection. En parallèle ces soldats du feu sont aussi testés dans les techniques « pures » de lutte incendie. Environ 200 soldats du feu suivent cet aguerrissement sur l’année.
Soucieux du maintien des compétences à un niveau d’excellence, des maitres instructeurs / conseillers en formation du centre sont en charge d’élaborer les contenus des formations, de les suivre, de les mettre à jour, de les faire évoluer en fonction des réglementations militaires et civils, mais ils doivent aussi assurer les tests, leurs corrections et leurs validations. Certaines qualifications donnant des équivalences « civiles ». Le centre est certifié par la DGAC dans les techniques et l’application des réglementations de l’aviation civile.
Toutes ces formations ont un seul but : former les spécialistes du CFR (Crash Fire and Rescue) qui interviendront sur des aéronefs militaires et leurs équipages avec des techniques adaptées du fait de la présence de munitions sur ou dans les avions, des systèmes pyrotechniques de protection et des sièges éjectables.
1400 pompiers assurent, en France et partout dans le monde où des aéronefs militaires sont déployés, la sécurité incendie et le sauvetage sur les bases et installations aériennes.