(Par Murielle Delaporte) –  Barkhane à l’ère du Covid : « une contrainte opérationnelle comme une autre » 

Pour le numéro deux de l’opération Barkhane, la pandémie actuelle n’a eu aucun impact sur les opérations en cours en bande sahélo-saharienne. De fait, explique le général Carcy, « l’objectif, dès le début de l’annonce de la pandémie et de l’état d’urgence sanitaire en France mi-mars, a été de faire en sorte que les missions puissent continuer grâce à une configuration préventive. »

En effet, si le continent africain et en particulier les pays du G5-Sahel semblent moins touchés pour le moment par le Covid-19 pour diverses raisons – populations jeunes ; températures s’étalant entre 30 degrés celsius la nuit et 50 degrés le jour ; faible humidité ; grands espaces désertiques -, la promiscuité inhérente à une vie militaire en opération extérieure a bien-sûr imposé un renforcement dans l’organisation de la chaîne de santé Barkhane et de nouvelles « bonnes pratiques » sanitaires.

Pour autant, ces dernières n’ont que peu perturbé le cours de la vie des 5 100 soldats français actuellement déployés dans les pays du G5-Sahel, ni le tempo des opérations particulièrement assidu depuis le Sommet de Pau. Les forces armées sont habituées à planifier en fonction d’ennemis imprévisibles et en constante mutation. Le Covid-19 n’est guère différent et a été considéré dès le début comme une « contrainte opérationnelle comme une autre ».

Un maillage médical bien adapté

« Comme pour toute menace, quelle que soit sa nature, nous avons commencé par faire une ‘étude de l’ennemi’ en nous focalisant en priorité sur le plus probable et le plus dangereux », souligne le général Carcy. En l’occurrence les « cas Covid avec personnels oxygéno-dépendants », d’où une toute première mesure prise pour renforcer la prise en charge médicale en matière de production et de capacité de stockage en oxygène. « Notre infrastructure et maillage médical sont bien répartis sur le théâtre Barkhane en dépit des quelques quatre millions de mètres carrés à couvrir avec en particulier la présence d’un Rôle 1 à Niamey et de deux Rôles 2 à Gao et N’Djamena respectivement. Ce qui nous a permis de rapidement configurer nos bases pour prendre immédiatement les bonnes mesures : identification des cas confirmés, des cas contacts et des cas suspects non testés ; isolement ; évacuation immédiate des cas présentant le plus de risques (notamment en présence de facteurs de comorbidité). »

La première clé a donc été de mettre en œuvre un système de détection précoce rendu possible par des tests disponibles permettant de discriminer entre différents virus de type grippe ou autre Corona et d’isoler ou d’évacuer uniquement les Covid-19 sans perturber les opérations. Traiter le Covid comme un ennemi comme un autre a ainsi permis de le prendre au sérieux, en appliquant exactement le même processus et les mêmes recettes que pour tout autre type d’ennemi et/ou tout type de contrainte opérationnelle – qu’il s’agisse des facteurs météorologiques (la saison des pluies peut être là-bas un phénomène extrêmement dangereux) ou d’un terrain affectant considérablement le niveau de disponibilité technique des matériels (une panne en plein désert est un risque là encore bien aussi important en exposant la vie des militaires à une embuscade) -, sans pour autant ne « penser qu’à cela ».

La seconde clé tient en effet à la nécessité de rassurer une communauté pouvant être particulièrement exposée. Le commandement de Barkhane a donc été particulièrement soucieux d’assurer une communication régulière « tous les deux jours », sans avoir besoin d’instaurer pour autant de « cellule psychologique spéciale Covid »…

Photos © Barkhane, MinArm