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Quelques jours seulement après son enlèvement, l’otage Hervé Gourdel a été décapité par ses ravisseurs en Algérie. 

Analyse. Passé le choc de la décapitation de l’otage Hervé Gourdel en Algérie, premier évènement du genre qui concerne un français depuis le début des atroces assassinats déclenchés par les djihadistes syriens et irakiens de l’Etat islamique (ou Daesch), il est impératif pour la France de se projeter dans l’avenir pour mieux anticiper les nouvelles crises auxquelles elle va devoir rapidement faire face.

Même si la prise de conscience collective ne peut intervenir qu’aujourd’hui avec ce type d’acte horrible, la France est une cible privilégiée par les terroristes depuis plusieurs années. Treize ans après le 11 septembre 2001, la France est pointé du doigt par les groupes islamistes pour son engagement militaire en Afghanistan, au Sahel, en Centrafrique et aujourd’hui en Irak. AQMI, le MUJAO, Boko Haram, les Shebab, l’Etat islamique. Tous ont appelé à viser les citoyens et les intérêts français par quelconques moyens que ce soit.

Mais quelles menaces pèsent réellement sur la France ?

D’une part, la menace peut être intérieure, c’est-à-dire que la France peut être frappée directement sur son sol. Un djihadiste revenant de Syrie – 189 français sur 1000 partis combattre en Syrie dans les rangs de l’Etat islamique sont revenus sur le sol français selon les explications du premier ministre Manuel Valls aujourd’hui devant le Parlement –  peut passer à l’action en peu de temps. Ces 189 personnes à surveiller consomment d’importantes ressources humaines et techniques des services de renseignement (DGSI et DGSE) engagés dans une guerre de l’ombre qui ne connaît pas de répit. Un groupe de personnes bien entraînées au djihad peut même se coordonner pour tenter de conduire une prise d’otages ou une tuerie préparée dans un endroit de choix. Ces attaques – comme on les a vu au Westgate au Kenya ou à Bombay en Inde – demandent une préparation minutieuse, des moyens importants en armes et en explosifs et souvent des complicités. Ces modes opératoires connus sont particulièrement surveillés.

L’autre menace intérieure peut venir d’un loup solitaire, un « lone wolf », qui se radicalise sur internet et qui décide avec ses propres moyens de mener une action isolée à fort impact médiatique. Mohammed Merah et Mehdi Nemmouche inspirent aujourd’hui beaucoup de jeunes sur les réseaux sociaux. Le premier ministre, Manuel Valls, a rappelé aujourd’hui que plusieurs actions terroristes ont été déjouées sur le sol français.

D’autre part, la France peut être visée à l’extérieur de son territoire. La DGSE a déjà évité plusieurs attaques contre des intérêts français à l’étranger au cours de ces dernières années. Une bombe peut être déclenchée devant un édifice français, tel qu’une ambassade ou un lycée français. Ces lieux de représentation française font l’objet d’une surveillance accrue notamment en Afrique. C’est sur ce continent où le risque d’enlèvements et de prise d’otages est le plus prégnant. Il ne fait nul doute que les terroristes tenteront une nouvelle attaque comme celle que l’on a connu à In Amenas en Algérie avec un désir de médiatisation toujours plus fort. C’est avec cette capacité à diffuser immédiatement des vidéos et des images de leurs actions que les terroristes essaient également de gagner la guerre de l’information. Enfin, les militaires français engagés en opérations extérieures constituent eux aussi des cibles de choix. Déployés aujourd’hui au Mali, au Niger, au Tchad, en Centrafrique, à Djibouti et désormais en Irak, les soldats français peuvent être ciblés par des attentats suicides. Cela a été le cas le 14 juillet dernier lors de l’explosion d’un véhicule piégé par un djihadiste tuant un légionnaire français au Mali, une attaque inédite depuis le début de l’opération Serval.

Demain, la France continuera à combattre le djihadisme qui s’étend en Syrie, en Libye, en Egypte. Même si l’opération française Chammal au-dessus du territoire irakien est aujourd’hui limitée à quelques frappes aériennes, la France peut payer de son engagement militaire en première ligne mis en exergue par un affichage politique nécessaire pour légitimer une action dont on ne peut mesurer encore toutes les conséquences. La tâche s’annonce longue et complexe.