Par le chef d’escadron Alexandre Pellerin – Cette dernière partie conclut sur les perspectives à l’horizon 2035 quant à l’intégration des drones de transport logistique au sein des forces armées.
5 – Prospective après 2035 : montée en gamme et autonomisation
Au regard des performances actuelles des drones de transport logistique, l’axe d’évolution le plus évident est la montée en gamme en termes de charge utile avec un horizon aux environs de 500 kg, et ce afin de couvrir pleinement le segment se situant en deçà de l’emploi utile de vecteurs « classiques ». Cela impliquera nécessairement de penser la soute, les types de conditionnement associés de charges qui commenceront à être conséquentes et également la formation des pilotes de drones « lourds ».
Cette montée en gamme pourrait se faire en partie en gagnant sur l’élongation, puisqu’une autonomie d’environ 300 km semble suffisante pour l’essentiel des cas d’usage, tandis que les drones existants aujourd’hui ont des autonomies souvent largement supérieures. En effet, la distance entre le groupement de soutien divisionnaire (GSD) et les éléments de soutien des unités au contact est, doctrinalement, d’une centaine de kilomètres. Une autonomie de 300 km permet donc un aller-retour entre ce GSD et les unités à soutenir. Ce qui est économisé en distance pourra être réinjecté en charge utile. L’université technique de Munich a par exemple remporté en 2023 un appel à projet du Fond Européen de Défense (FED) intitulé iMEDCAP dont l’objectif est de développer un drone d’évacuation sanitaire ayant une charge offerte de 500 kg.
Un autre axe d’évolution consiste en une certaine forme d’autonomisation, avec notamment une capacité à collaborer avec d’autres drones, quelle que soit leur fonction, ou encore à s’orienter dans un milieu complexe, notamment dans un environnement 3D congestionné. Ces éléments sont identifiés entre autres dans le défi 2 intitulé « Systèmes intelligents » du Plan stratégique scientifique 2015-2025 (mis à jour en 2020) de l’office national d’études et de recherches aérospatiales (ONERA), qui a notamment pour mission de développer et d’orienter les recherches à finalité civile et militaire dans le domaine aéronautique et spatial.
En conclusion, le domaine du drone militaire de transport de fret est encore très immature, que ce soit d’un point de vue technologique (faible capacité d’emport des vecteurs existants) comme doctrinal (concepts d’emploi encore embryonnaires). Cependant, sous la double impulsion, d’une part, des perspectives de développement du marché dans la décennie à venir, et, d’autre part, de l’intérêt croissant de ces systèmes dans les conflits en cours, des drones logistiques devraient intégrer de façon croissante la palette des outils tactiques, voire opératifs de nombreuses armées. En effet, comme cet article a tenté de le démontrer, ces vecteurs offrent des options pertinentes dans le cadre d’une logistique plus réactive et plus agile, pleinement au service de la capacité opérationnelle des unités au contact. Cela s’avère d’autant plus pertinent dans une armée française se préparant à un engagement majeur, où les unités tactiques, plus dispersées et faisant face à une friction plus grande, devront impérativement conserver l’initiative pour vaincre.
Illustration © image d’un drone aérien de transport logistique générée par intelligence artificielle générative « Microsoft Bing »