(Source : Assemblée nationale) – Audition du général François LECOINTRE, Chef d’état-major des Armées, devant la Commission de la Défense nationale et des Forces armées de l’Assemblée nationale le 16 juillet 2020 (à huis clos) sur « L ’analyse des conséquences stratégiques et militaires de la crise Covid, vision des perspectives qu’elle dessine » (extrait du compte rendu)

Au niveau international, la crise de la COVID 19 a agi comme un « accélérateur et un révélateur des tensions préexistantes ». Le CEMA s’est dit particulièrement inquiet quant aux développements observés aux portes de l’Europe. Les tensions en Méditerranée, dont l’instabilité politique en Libye constitue le coeur, sont un point d’intérêt croissant. Au Sahel, où la situation politique au Mali est jugée préoccupante les armées ont su se montrer à la hauteur de l’impulsion donnée au sommet de Pau malgré la COVID 19 . Une attention particulière est portée sur les risques de contagion de la menace terroriste. La mise en place de la Task force Takuba et le prolongement du mandat de la MINUSMA montrent que l’action diplomatique et militaire n’a pas faibli.

L’engagement français au Proche et Moyen Orient, dans le cadre de l’opération Chammal notamment, permet à la France de jouer un rôle majeur dans la lutte contre le terrorisme et dans l’appui aux forces irakiennes, et ce alors qu’on assiste à une résurgence de Daech. En Asie Pacifique enfin, la stratégie d’alliances se met progressivement en place, en réponse à l’attitude de moins en moins complexée de la Chine.

Pour le général François Lecointre , la crise de la COVID 19 permet de tirer certains enseignements stratégiques. Cette crise a d’abord précipité le déclin du multilatéralisme qui s’est traduit par une marginalisation de l’Europe et une certaine solitude de la France La politique du fait accompli est davantage banalisée, comme le montrent les actions récentes de la Turquie dans le nord est syrien ou en Méditerranée. On assiste à un délitement général de l’architecture de sécurité, avec le risque pour les pays européens d’en être de simples spectateurs Or, pour le général François Lecointre, « le multilatéralisme comme mode de gestion pacifique des conflits ne peut être préservé que si l’ Europe en porte la cause ». Dans un tel contexte, la France doit se préparer à l’éventualité d’un conflit de haute intensité.

Cette crise a également accéléré l’ extension des champs de la conflictualité : durcissement d’une part, avec des adversaires qui accèdent à des capacités militaires de haute technologie (stratégies de déni d’accès par exemple) et confirmation de nouveaux espaces de confrontation (exo atmosphérique, cyber et informationnel).

La dimension sanitaire constitue enfin un nouveau facteur de crise globale qui a bouleversé les grands équilibres au sein des Etats et accentué le repli sur soi. Le risque sanitaire a révélé la vulnérabilité des bases arrières des armées, construites ces dernières décennies sur un modèle de corps expéditionnaire agissant à partir d’une zone où la sécurité et le fonctionnement normal de l’Etat étaient garantis. (…)

 

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Photo © Général Lecointre, ibid