Par Linda Verhaeghe – Crises majeures : un colloque pour se préparer à être prêts…

« Humilité, collectif et partage »,  sont les trois mots de conclusion de Madame Nicole Klein, préfète de région honoraire et présidente de la Chaire « Défense et Sécurité du Territoire national » (chaire TN), en clôture du colloque « Territoire national et crises majeures : être prêts ! », organisé par le Centre de recherche Saint-Cyr-Coëtquidan (CReC) et le groupe Aéroports de Paris (ADP), à l’Ecole militaire (Paris), mercredi 17 mai 2023.

Issue d’un partenariat entre le CReC, le Commandement Terre pour le territoire national (COMTN) et la Fondation Saint-Cyr, la chaire TN bénéficie également du parrainage d’acteurs stratégiques, tels ADP, dans la perspective de soutenir les études de haut niveau autour de l’ensemble des risques et menaces susceptibles d’atteindre à la sécurité intrafrontalière du pays : actes terroristes, catastrophes naturelles, conflits hybrides, etc.

La rencontre a bien sûr mis en exergue les différents enjeux de la préparation à ces dangers : capacité d’anticipation et de réaction (par la formation, l’expérimentation, ou bien la sensibilisation de la population aux enjeux de défense), ou encore l’amélioration de la coordination public-privé, au travers de trois tables rondes introduites par le général de corps d’armée Patrick Quevilly, major général de l’armée de Terre.

En préliminaire de celles-ci, Augustin de Romanet, président-directeur général du groupe ADP, a d’abord souligné le fait que « l’aéroport n’est pas une installation comme les autres » : de par son trafic, mais aussi de par les menaces qui le caractérise (terrorisme, activistes anti-pollution, cyberattaques…).

La première table ronde, a donc porté sur l’anticipation des crises depuis les instruments technologiques et industriels et associé des chercheurs autour de pistes de réflexion relatives à la conjonction entre modèle économique, institutionnel et évolutions technologiques, en vue de répondre efficacement aux différentes menaces sécuritaires.

Plus précisément, a été débattue la question de la base industrielle et technique de défense (BITD) face au passage à une économie de guerre, avec pour principal défi la construction d’un outil adapté à une remontée en puissance, en matière de production, de stocks de matériels et de ressources humaines qualifiée, pour pouvoir gérer un conflit dans la durée dans un contexte de format d’armée réduit. Aussi, les potentielles solutions que pourrait apporter l’intelligence artificielle génératives de type GPT-4 dans la gestion de crise et en particulier dans la détection des crises naissantes.

La table ronde suivante a abordé le continuum de sécurité et de défense, au regard de l’évolution des menaces, avec pour intervenants le général de corps d’armée Christophe Abad, Gouverneur militaire de Paris, Officier général de zone de défense et de sécurité de Paris et commandant de la zone Terre Ile-de-France, le général de corps d’armée Olivier Kim, Directeur des opérations et de l’emploi à la Direction générale de la Gendarmerie nationale (DGGN), ainsi que Gabor Arany, sous-directeur de la planification de sécurité nationale au Secrétariat général de la Défense et de la Sécurité nationale (SGDSN).

Au coeur des échanges, la capacité à faciliter l’engagement et la réactivité des armées sur le territoire national, au travers d’un dialogue civilo-militaire renforcé (notamment illustré par les enjeux des Jeux olympiques à venir), ou encore la question de la résilience de la population.

La troisième et dernière table ronde a enfin réuni de hauts responsables du groupe ADP et de la compagnie aérienne Air France, pour évoquer le maintien des activités, offrant de cette manière un regard croisé sur la réponse opérationnelle à ces risques majeurs, illustré par la récente crise du Covid.

Outre ce sujet de continuité d’activités, est ressortie une problématique stratégique de souveraineté nationale liée au fait que la législation interdit une quelconque préférence nationale dans le choix des fournisseurs. Cela, même lorsqu’il s’agit de l’acquisition d’équipements sensibles, créant ainsi des vulnérabilités évidentes. Selon les intervenants, il faudrait dans certains cas pouvoir déroger à ces obligations juridiques.

De manière globale, les diverses approches discutées impliquent de nécessaires solidarités entre acteurs européens, publics et privés, civils et militaires.

 

Photo  :  Augustin de Romanet, PDG du groupe ADP, a rappelé le caractère sensible des aéroports, précisant à titre d’exemple que le groupe ADP accueille une moyenne de 170 millions de passagers par an © Linda Verhaeghe