Par Olivier Azpitarte
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Contre-Amiral Jean-Louis Kérignard
Crédit photo : Olivier Azpitarte, conférence de presse à Paris, 30 septembre 2010
Né à Toulon en février 1954, il a commandé l’aviso Jean Moulin puis, dirigé les opérations de la frégate Jean Bart pendant le conflit en ex-Yougoslavie. Il a ensuite commandé la frégate Cassard et participé à l’opération Liberté Immuable en protection du porte-avions Charles de Gaulle en 2001-2002 – lors de cette campagne de sept mois, les bâtiments du GAN avaient parcouru l’équivalent de trois fois le tour de la terre. En 2005, il a exercé des fonctions au sein du commandement de l’OTAN en charge de la transformation. En 2007, il participe à la campagne du Charles de Gaulle dans l’océan indien en tant que Deputy COMFRMARFOR (1). Il est nommé COMFRMARFOR à l’été 2010.
15 octobre 2010 – Le groupe aéronaval (GAN) a appareillé cette semaine de Toulon pour plusieurs mois de mission. Le retour à quai du Porte-avions Charles de Gaulle le jeudi 14 en raison d’«un défaut d’isolement dans une armoire électrique dans le secteur propulsion du navire» ne devrait pas remettre en question la mission et l’objectif de ce cinquième déploiement en Océan indien depuis 2001, juste décaler ce dernier le temps de la réparation. Même si négatif en termes d’image de marque et de relations publiques, ce retard est rassurant puisqu’il démontre au contraire que les soupapes de sécurité existent…
Le GAN va donc porter le nom de TF 473 (Task Force 473) durant cette campagne baptisée, comme les cinq précédentes, Agapanthe : une plante de la famille des liliacées courante en Provence, également appelée “tubéreuse bleue”… Le bouquet comprend le porte-avions Charles de Gaulle, trois bâtiments en protection (dont un sous-marin), et un pétrolier ravitailleur pour le soutien logistique.
Contre-piraterie et soutien logistique : Le pétrolier ravitailleur La Meuse (2) est commandé par le capitaine de frégate Bertrand Hudault. Il ravitaillera les bâtiments de la TF 473 en gazole et en carburéacteur, en munitions, en vivres et en matériel de rechange. Armé de missiles Mistral, de mitrailleuses 12,7 mm et d’un canon de 40 mm, ce navire de 157 mètres a une capacité de 8400 tonnes d’eau et de carburant. Il embarquera pour la mission Agapanthe un hélicoptère Alouette III. Il était jusqu’à cette mission bâtiment amiral de la Task Force 150 assurant des missions de contre-piraterie au large de la Somalie. C’est à son bord qu’ont été conduites les opérations de libération d’otage du Ponant, du Carré d’As et du Tanit.
400 vols prévus sur l’Afghanistan
L’effet majeur de cette mission se déploiera au large du Pakistan à partir de la mi-novembre : le groupe aérien embarqué (GAE), comprenant notamment dix avions Rafale F3 (3), douze Super Etendard Modernisés (SEM) et deux Hawkeye effectuera des missions d’appui des troupes au sol et de renseignement en Afghanistan. Pendant 40 jours non-stop, la piste du Charles de Gaulle sera le terrain d’une incessante noria d’aéronefs: vol, ravitaillement, maintenance bien sûr, mais aussi réarmement. En moyenne, cinq vols sur les dix vols quotidiens devraient en effet inclure une mission d’appui aérien rapproché (Close Air Support – CAS – en jargon otanien), dont certaines comprendront une utilisation des canons ou des bombes embarquées. Au total, le GAE assurera plus de 400 vols.
Participation au contre-terrorisme du gouvernement américain
Cette période de 40 jours, précise le Contre-Amiral Jean-Louis Kérignard commandant le dispositif (4), s’inspire d’un modèle déjà éprouvé par l’US Navy. Lors d’une conférence de presse à Paris le 30 septembre dernier, il a annoncé, sans surprise, que ces missions se dérouleront à la fois pour le compte de l’OTAN (opération FIAS, force internationale d’assistance à la sécurité, ISAF en anglais) et pour celui de la coalition sous leadership américain (opération liberté immuable, « Operation Enduring Freedom, OEF » en anglais dans le texte). Mais ces missions seront “toujours sous le contrôle du chef d’Etat-Major des Armées (l’Amiral Edouard Guillaud ndlr)” a-t’il précisé. (5) Comprendre : avec l’approbation du chef de l’Etat, qui donne toute sa légitimité à cette action militaire. La précision a son importance. En effet, l’opération Liberté Immuable est l’appellation du gouvernement américain pour la phase militaire de la campagne de guerre contre le terrorisme qui a débuté le 7 octobre 2001. Elle comprend l’Afghanistan, mais ne s’y restreint pas : la région de la Corne de l’Afrique, celle du Grand Sahara, et les Philippines en font également partie. Une grande confidentialité, assumée par le gouvernement américain, entoure Liberté Immuable : la plupart des GI’s sont sous commandement OTAN au sein de la FIAS, mais des milliers d’hommes demeurent sous commandement Liberté Immuable, notamment des composantes du renseignement et des forces spéciales. Les deux opérations se déroulent en parallèle et en coordination l’une avec l’autre. Mais quelle est l’opération qui a la priorité en cas d’arbitrage au niveau du commandement ? Il est très difficile de répondre à cette question. La simplicité des termes de la mission OEF – contre-terrorisme – fait face à la complexité très politico-militaire des termes de la mission de la FIAS (6). Réponse, en forme de provocation : des T-shirts vendus au bazar officiel de la base de Bagram (le “PX”) indiquent une prise de position sans nuance : l’Afghanistan et la FIAS sont purement et simplement les propriétés d’OEF (“properties of op enduring freedom” en anglais dans le texte).
T-shirt en vente au magasin PX de Bagram en août 2010 (Crédit : Olivier Azpitarte)
Satisfecit officiel des Etats-Unis
Depuis 2006 et la fin de la mission Ares des forces spéciales françaises sous commandement OEF en Afghanistan, les missions du GAE sont à ce jour les seules missions conduites par des militaires français sous commandement OEF. La France, qui n’est officiellement pas en guerre, participera pendant quarante jours à un effort de guerre américain. Il s’agit de la cinquième campagne du porte-avion Charles de Gaulle – la première avait eu lieu en 2001. A chaque fois, le porte-avions a participé à l’opération Liberté Immuable : le Capitaine de Vaisseau Jean-Philippe Rolland en assure le commandement depuis 2009 (7). On comprend alors mieux l’importance diplomatique du groupe aéronaval (GAN) dans l’amitié franco-américaine. L’amiral Gary Roughead, patron de la flotte américaine, a envoyé les signaux positifs attendus par la France lors d’une visite en France en juillet (8).
Opération Atalante et coopérations bilatérales
Outre la mission d’appui aux opérations en Afghanistan, le GAN fera escale à Djibouti et à Abu Dhabi (9), assurera une posture de contre-piraterie au large de la Somalie dans le cadre de l’opération Atalante, et conduira des exercices désormais traditionnels avec nos alliés : Arabie Saoudite (exercice White Shark), Emirats Arabes Unis (exercice Big Fox) et l’Inde (exercice Varuna).
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Références
1. Commandant la Force aéromaritime française de réaction rapide
2. http://www.netmarine.net/bat/pr/meuse/index.htm et http://www.belgian-navy.be/marine-francaise-franse-marine-french-navy-f19/les-news-en-photos-du-port-de-toulon-t304-195.htm
3. http://secretdefense.blogs.liberation.fr/defense/2008/07/rafale-feu-vert.html
4. Baptisé Force aéromaritime française de réaction rapide (FRMARFOR)
5. L’amiral Edouard Guillaud a commandé le porte-avions Charles de Gaulle en 1999-2001. http://www.defense.gouv.fr/ema/le-chef-d-etat-major/biographie-du-cema
6. http://www.isaf.nato.int/mission.html
7. Né à Toulon en mai 1964, le Capitaine de vaisseau Rolland a commandé l’aviso Commandant Bouan en 1998. En 2003, il a été responsable des opérations à bord du porte-avions Charles de Gaulle lors de la deuxième campagne du groupe aérien embarqué en Afghanistan. En 2005, il a commandé la frégate furtive La Fayette, en opération notamment dans l’océan Indien dans le cadre de l’opération Liberté Immuable.
8. http://www.meretmarine.com/article.cfm?id=113758
9. Une première d’après http://lemamouth.blogspot.com/2010/09/le-pacdg-en-zone-afghane.html
