Harpie : une opération interministérielle et interarmées

Opération interministérielle, Harpie est pilotée par le préfet de la région Guyane et le procureur de la République dans le cadre de la lutte contre l’orpaillage illégal (LCOI). Cette mission intérieure est conduite conjointement par les forces armées en Guyane (FAG), la gendarmerie, mais aussi les douanes, la police aux frontières, l’office national des forêts (ONF), la direction de l’environnement, de l’aménagement et
du logement (DEAL) et le parc amazonien de Guyane (PAG).

Dans le cadre de la LCOI, le travail de chaque acteur est crucial et complémentaire. Ainsi, le procureur de la République, qui dirige l’ensemble des enquêtes ouvertes dans le cadre d’Harpie, a vu son champ d’action s’étendre grâce au durcissement de la classification d’un certain nombre de délits notamment celui de transport non autorisé de matériels destinés à l’orpaillage clandestin. La menace que représente son implication au sein de l’opération Harpie a un effet dissuasif notamment pour les ressortissants français qui pourraient être tentés de venir en aide, moyennant finances, aux garimpeiros (orpailleurs illégaux).

Autre acteur essentiel ; les employés du PAG. Ces derniers, dont les effectifs demeurent modestes, jouent un rôle de premier plan en termes d’alerte et de surveillance du territoire guyanais. Les dirigeants du PAG possèdent aussi des relais puissants au sein du ministère de la transition écologique et solidaire ainsi qu’au sein de l’opinion publique tant guyanaise que métropolitaine chacun ayant bien pris conscience de la valeur inestimable de la biodiversité présente au sein de la forêt amazonienne de Guyane. Acteur complémentaire du PAG, l’ONF constitue une aide précieuse en termes de renseignement de par la présence de ses agents sur le terrain mais aussi via les relevés effectués par ces derniers dans les domaines de la turbidité des cours d’eau ainsi que des zones de déforestation constatés. En ce sens, le PAG et l’ONF constituent une source de renseignements précieux pour les FAG ainsi qu’une une aide tactique de premier plan.

Mais la coopération cardinale qui constitue le cœur de l’opération Harpie est celle qui unit les FAG et les forces de gendarmerie déployées sur le territoire guyanais. Cette coopération se fait à la fois au niveau des états-majors avec notamment la création relativement récente d’un état-major Harpie (aux ordres du commandant de la gendarmerie (COMGEND), poste d’officier général depuis 2011) mais aussi et surtout au sein des bases opérationnelles avancées (BOA), des postes de contrôle flottants (PCF) et des postes opérationnels avancés temporaires (POAT). Le partage de renseignement est aujourd’hui total puisque les points de situation, la planification et la condition des opérations s’effectuent en commun. Ainsi, le préfet se retrouvent conseillé à la fois par le commandant supérieur des FAG et par le COMGEND dans la conduite de son action. De plus, il convient de souligner que les forces armées comme la gendarmerie se sont dotés de troupes spécialement formés au combat en milieu amazonien avec les légionnaires du 3ième REI qui ont notamment en charge le Centre d’entrainement en forêt équatorial (le fameux CEFE dont les stages sont réputés être parmi les plus difficiles au monde), les marsouins membres des CRAJ du 9ième RIMA sans oublier les gendarmes du GIGG (groupement d’intervention de la gendarmerie en Guyane) dont le personnel, volontaire et spécifiquement entraîné, use de techniques et de méthodes proches de celles usitées par le GIGN.

L’action des FAG et des gendarmes se concentrent sur 3 zones géographiques principales : au nord-est de la Guyane, au sud dans une zone qui s’étend du Maroni à l’Oyapock et au nord-ouest dans un périmètre qui s’étend de Saint-Georges à Régina et qui descend jusque Camopi.

La LCOI est d’essence interministérielle car Harpie n’est que le maillon d’une stratégie globale. Cette stratégie passe du traitement judiciaire du phénomène à la réoccupation des espaces libérés de l’occupation criminelle de la forêt par les garimpeiros via le retour à des activités légales le tout s’inscrivant dans développement de la coopération internationale de la lutte contre ce fléau écologique et économique qui réduit des milliers d’hommes à l’état d’esclave. Mais à l’évidence la LCOI ne serait que bien peu de chose sans la mission Harpie et l’action quotidienne des forces armées au sein de l’enfer vert. Sous l’épais manteau de la forêt primaire, des soldats français arpentent des lieux qui ont précédé l’avènement de l’espèce humaine et défendent une cause qui est de toute évidence sans frontière tant notre avenir commun se joue aussi dans la préservation de ce joyau à la beauté envoutante et majestueuse qu’est la forêt amazonienne.

 Crédits photographiques : romain petit