(Source : novastan.org via oeildelaresilience.com) – Daech menace-t-il le Tadjikistan ?

Au Tadjikistan, un certain nombre d’habitants soutiennent, même partiellement, les vues de l’État islamique. Les récents attentats dans le pays montrent que la guerre contre Daech est loin d’être gagnée, estime le politologue tadjik Parviz Mullodjanov.

Novastan reprend et traduit un article initialement publié le 21 novembre 2019 par le média tadjik Asia-Plus.

Le 6 novembre dernier, un avant-poste frontière entre le Tadjikistan et l’Ouzbékistan situé à Ichkobod a été attaqué. Cet attentat a été le premier revendiqué par le groupe État islamique après la mort de son ancien chef Abu-Bakar Al-Baghdadi.

Le politologue tadjik Parviz Mullodjanov explique ce à quoi les pays d’Asie centrale doivent encore s’attendre de la part de l’État Islamique.

Asia-Plus : L’Etat islamique a revendiqué l’organisation de l’attentat de Danghara et les rébellions dans les prisons de Khodjent et Vakhdat. Peut-on dire que l’État islamique a pris racine au Tadjikistan ?

Parviz Mullodjanov : Nous ne disposons pas de toutes les informations, dans la mesure où ce sont les forces de l’ordre qui les détiennent. Cependant, la majorité des experts estime que Daech en a la capacité. Ce groupe possède aujourd’hui suffisamment de membres et de ramifications dans tout l’espace post-soviétique, notamment dans les régions musulmanes. Dans le nord du Caucase, par exemple, on a vu une part considérable des subdivisions de l’ancien Émirat du Caucase prêter allégeance à Daech.

L’autre fait est qu’aujourd’hui, la spécificité organisationnelle de Daech ne réside pas tant dans des filiales et des cellules bien structurées que dans la création de différents groupes de partisans en réseau. Il s’avère que ces groupes ne font pas partie de Daech d’un point de vue organisationnel, mais ils partagent leurs idées et se trouvent sous l’emprise de ses propagandistes et des « managers de réseau ».

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Une telle approche permet à Daech de s’adresser au plus large public possible, à la différence des structures traditionnelles en cellules et filiales clandestines. Plus le réseau de soutiens idéologiques est amorphe, plus il est difficile de le surveiller. Un tel groupe d’adeptes peut ne pas appartenir formellement à la structure de Daech, mais partager l’idéologie extrémiste. Ils communiquent alors par Internet et reçoivent des sortes d’instructions générales. Ils peuvent planifier en autonomie des actions sur place.

A quel point peut-on croire les déclarations de Daech revendiquant la paternité de tel ou tel attentat ayant eu lieu au Tadjikistan ?

Daech revendique souvent tout ce qu’il peut – cela fait partie de sa stratégie d’agence de relations publiques. Et toutes les organisations radicales procèdent de la sorte. Le fait est qu’on ne peut pas toujours les croire. Mais chez Daech, la façon de mener le djihad a changé. Aujourd’hui ils donnent de grandes lignes à des gens qui partagent leurs idées et sont prêts à agir individuellement.

Par exemple, la direction de Daech appelle ses partisans par Internet à faire le djihad avec tous les moyens à disposition : prenez un couteau, allez dans la rue, tuez des chrétiens, des mauvais musulmans ou les hypocrites. Faites le djihad sur place, comme vous le voulez et comme vous le pouvez. Simplement, tuez, agissez, faites exploser. Pour de tels attentats, on n’a besoin de rien, a fortiori d’aucune préparation spéciale. Tout ça, c’est dur à surveiller. Et bien que d’un point de vue organisationnel, l’attentat peut ne pas être lié à lui, Daech peut se porter garant de personnes, auxquelles il a donné des consignes générales. (…)

 

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Photo © Une attaque à un poste-frontière tadjik a fait 17 morts, dont un garde-frontière et un policier tadjiks, Service de presse du ministère de l’Intérieur tadjik, telle que publiée dans ibid.