Par Murielle Delaporte –: « Tu n’abandonneras jamais ni tes morts, ni tes blessés… » : un code d’honneur militaire de facto adopté par la Mutuelle d’Assurance des Armées depuis plus de cent ans
Entretien avec le général d’armée (2S) Gérard Desjardins, président, et Madame Pascale Seni-Lapp, directeur général de la Mutuelle d’Assurance des Armées.
Ne jamais laisser un camarade derrière qu’il soit en difficulté, qu’il soit blessé ou qu’il soit mort fait partie de l’ethos de tout militaire. La devise « Tu n’abandonneras jamais ni tes morts, ni tes blessés … » est issue du dernier article du code d’honneur de la Légion étrangère[1] et pourrait être celle de la Mutuelle d’Assurance des Armées (MAA), dont la philosophie de venir en aide à ceux qui exposent leur vie pour protéger la Nation et à leurs proches qui risquent, par absence de prévoyance, d’être « laissés derrière » justement, ne s’est jamais altérée depuis plus d’un siècle.
Créée en 1912, face aux traumatismes de la Première guerre mondiale, « la MAA a toujours, au fil de l’Histoire, suivi l’évolution des forces armées et, aujourd’hui, celle de tous ceux qui veillent sur notre sécurité », ainsi que l’explique Pascale Seni-Lapp qui dirige la société depuis 2007.
Le partenariat, noué en 2023, avec le géant de l’assurance Allianz – et dont le credo commun est « ancré dans l’histoire, unis pour vous protéger » – s’inscrit dans le même esprit tout en ouvrant une porte vers l’avenir.
Ce sont ces perspectives de développement que nous décrivent dans cet article Pascale Seni-Lapp et le général (2S) Gérard Desjardins, lequel préside un conseil d’administration composé de cadres du ministère des Armées et du ministère de l’Intérieur et bien au fait des difficultés rencontrées par les personnels relevant de leur domaine respectif, qu’il s’agisse de l’armée de Terre, de la Marine, de l’armée de l’Air et de l’Espace, de la Gendarmerie, de la Police ou encore des pompiers, mais aussi plus largement de « tous les corps de métiers exposés au quotidien à des environnements à risque », tels par exemple les personnels de santé ou encore le personnel pénitencier[2].
Jamais sans soutien
Ayant alterné les commandements opérationnels (17 ans), la formation (8 ans) avec notamment le commandement de l’École des officiers de Gendarmerie à Melun et les affectations en état-major (12 ans) essentiellement dans le domaine des ressources humaines, le général (2S) Desjardins a toujours placé l’humain au cœur de ses préoccupations. « Pour qu’un gendarme travaille bien et sereinement, il faut qu’il sache qu’en partant de chez lui, sa famille sera protégée », souligne-t-il.
Et c’est bien ce principe qui continue d’insuffler cette impulsion d’entraide et de solidarité personnalisée qui est la marque de fabrique de la Mutuelle d’Assurance des Armées (MAA). « Jamais sans soutien » – et en particulier le soutien médical et de rapatriement en cas de blessure ou de décès – est pour ceux qui partent en opération ou en intervention la condition sine qua non pour que celle-ci puisse se dérouler sans s’inquiéter de ce qui peut leur arriver[3]. Savoir en plus que les siens sont bien protégés en leur absence, ou s’il leur arrivait quelque chose, est en quelque sorte la continuation « à la maison » de ce qui doit être la norme « sur le terrain ».
Cette prise de conscience remonte à la Première guerre mondiale et conduisit à établir les fondations de ce qu’est aujourd’hui la Mutuelle d’Assurance des Armées, laquelle siège toujours dans son immeuble originel, rue de Madrid à Paris.
« La MAA a vu le jour, tout au moins à l’état de projet, dans l’esprit de son fondateur, [Ndlr : Monsieur A. Holozet], dès 1910. Pendant les grandes manœuvres, dans le régiment auquel il appartenait, un sous-officier fut tué, un autre grièvement blessé ; quelques mois plus tard un officier trouvait la mort dans un accident de cheval. Des listes de souscriptions circulèrent. Il s’agissait de venir en aide à la veuve du jeune officier, pour ainsi dire sans ressources, et aux parents des deux sous-officiers dont les principaux soutiens venaient de disparaître.
Au Mess et au Cercle on commenta longuement ces tristes événements. Pourquoi ne créait-on pas, pensait-on, pour les officiers et sous-officiers, une Société Mutuelle qui apporterait, dans ces cas, aux veuves ou aux ayants-droits une aide efficace. Combien de fois cette question fut posée ?
Puis les jours et les mois passèrent. Deux ans plus tard, en 1912, parmi ceux qui avaient été rendus à la vie civile, et qui n’avaient pas oublié les camarades disparus, il s’en trouvait un qui voulut réaliser l’idée de tous, en mettant sur pied une Société Militaire qui serait uniquement réservée aux personnels des armées. En décembre 1912, il fonda une société qu’il dénomma « la société militaire française ‘Accidents’ » », peut-on lire sur la page Histoire du site de la MAA[4].
En raison de la guerre et des difficultés de financement, le projet ne se concrétisa officiellement qu’en 1931 avec la naissance de la « Mutuelle des armées de Terre et de la Mer ». La Mutuelle d’Assurance des Armées demeure ainsi la plus ancienne assurance consacrée aux forces armées et de sécurité qui existe à l’heure actuelle en France, ainsi qu’elle « le porte dans son nom », comme le souligne Pascale Seni-Lapp.
Avec la concurrence croissante de nouveaux acteurs, la MAA a cependant, depuis 2007, entrepris une politique de développement à deux volets :
- Le premier fut la réorganisation de la structure de gouvernance avec la mise en place d’une « petite équipe de dix personnes permettant de faire preuve d’agilité et de réactivité avec en particulier un traitement personnalisé et humain de chaque dossier et requête » : « agir vite doit en effet faire partie de l’ADN de toute activité dont la vocation est de résoudre des problèmes de prévoyance », rappelle le général Desjardins, cette réflexion a conduit à des évolutions significatives des produits de prévoyance proposés pour l’ensemble de la famille, facilitées par la constitution d’un conseil d’administration directement impliquée. Résultat, la MAA peut s’enorgueillir d’être passé de 20 000 adhérents en 2009 à plus de 110 000 aujourd’hui et de bénéficier d’une belle santé financière.
- Le second volet fut la décision de signer une convention de partenariat en 2023 avec le Allianz, leader mondial dans le domaine des assurances. Pourquoi une telle alliance « entre la puce et l’éléphant » ? En raison d’une complémentarité d’intérêts mutuels entre les deux entités, explique la directrice générale de la MAA : «Allianz souhaitait consolider son image dans le secteur de la défense et la sécurité et s’ouvrir une porte dans le monde particulier de l’économie sociale et solidaire (ESS), ce que la Mutuelle d’Assurance des Armées, aussi petite soit-elle, lui confère en toute légitimité. La MAA qui voyait la poursuite significative de son développement, grâce notamment au réseau de distribution d’Allianz Défense Sécurité, fort de 120 conseillers sur le territoire français.»
Deux ans plus tard, ce partenariat « gagnant-gagnant » basé sur un respect réciproque entre la Mutuelle d’Assurance des Armées et Allianz Défense et Sécurité se révèle une stratégie payante avec une croissance régulière et de nouveaux axes de développement novateurs basés sur un accompagnement « tout au long [du] temps de vie, dans le professionnel comme dans le civil »[5]. Le binôme MAA-ADS représente ainsi aujourd’hui un tiers du marché de l’assurance prévoyance en défense et sécurité.
« Un pied dans le futur »
Au-delà de la complémentarité offerte par cette nouvelle dynamique, ce qui enthousiasme Pascale Seni-Lapp est le « pied dans le futur » qu’elle apporte en boostant l’offre existante de la MAA : « nous sommes dorénavant en mesure de proposer de nouveaux produits en identifiant de nouveaux besoins, et ce, grâce au développement de nouveaux outils extrêmement performants et modernes, lesquels sont normalement inaccessibles pour une petite mutuelle. »
Parmi les axes de développement particulièrement innovants qui se renforcent ou se créent, deux exemples illustrent la vision de la MAA toujours dans l’esprit initial de ses fondateurs :
- Le premier concerne l’évolution des forces armées et de sécurité telle qu’évoquée précédemment : si l’effet Bataclan a été pris en compte de façon naturelle en raison de la nature des prestations délivrées depuis des décennies par la MAA, ce qui est nouveau est le sentiment d’insécurité et l’infiltration de la violence extrême dans le quotidien de professionnels exposés à des situations et individus imprévisibles, que ce soit dans le cadre du maintien de la paix en cas d’émeutes, ou dans le cadre de l’enseignement. « Il existe une vraie demande parmi de nouvelles catégories de professionnels – enseignants, policiers, pompiers par exemple – qui doivent faire face à des situations autrefois typiques des militaires et primo-intervenants. (…) Nous nous sommes notamment adaptés à ces nouveaux besoins en intégrant de nouveaux cas de figure – tels l’occurrence d’assassinats ou du syndrome post-traumatique (PTSD) – dans la cible Accidents.»L’esprit de la « Société militaire française ‘Accidents’ » du début du siècle dernier perdure pour assurer la complémentarité avec la prise en charge médicale classique proposée par l’Etat et les compagnies d’assurance. A la différence près que cet esprit s’est au fil du temps élargi – hélas – à nombre d’acteurs de la société civile qui se sentent démunis et ont besoin de se sentir rassurés. « En offrant une garantie ciblée ‘Accident par destination’, non seulement nous accélérons la prise en charge, ce qui est possible grâce à notre réactivité structurelle, mais nous pouvons également assurer une garantie plus large de façon à ne laisser personne sur le côté (…) : il nous faut repenser tous les risques à l’aune des menaces actuelles… », explique la directrice générale.
- Le second exemple concerne la prise en charge d’une nouvelle population demandeuse, à mesure qu’elle croît en raison de l’évolution des forces armées et de sécurité face aux nouvelles menaces et contexte géostratégique, à savoir les réservistes : « notre contrat spécial réserve ne cesse de croître depuis la genèse de notre partenariat avec Allianz. » Un potentiel amené à poursuivre une croissance exponentielle, étant donné l’augmentation régulière des réservistes dans toutes les branches de la défense et de la sécurité.
Faire évoluer l’offre « au rythme des dangers rencontrés dans les vies professionnelles »[6] est la grande force du partenariat MAA-ADS face à une demande au cœur de laquelle « se trouve toujours l’Humain : prévoir et anticiper permettent de ‘gagner la guerre avant la guerre’ selon la doctrine du chef d’état-major des Armées, tandis que la confiance dans les soins, les secours, et l’assistance dont on a besoin au moment T doit demeurer la valeur clé qui anime notre action », concluent de concert Pascale Seni-Lapp et le général (2S) Desjardins.
La confiance, une des « valeurs chevillées au corps » de la MAA[7] et « valeur clé », mais aussi la clé du succès de cette dernière du XXème au XXIème siècle …
Notes
[1] Article 7 : « Au combat, tu agis sans passion et sans haine, tu respectes les ennemis vaincus, tu n’abandonnes jamais ni tes morts, ni tes blessés, ni tes armes. »
[2] https://www.maa-ads-assurance.fr/prevoyance-individuelle/
[3] Voir nos publications sur ce sujet >>> https://operationnels.com/acces-publications/
[4] http://temp.maa-assurance.fr/wp-content/uploads/2023/06/HISTOIRE.pdf
[5] https://www.maa-ads-assurance.fr/prevoyance-individuelle/
[6] Ibid
[7] https://www.maa-ads-assurance.fr/partenariat/
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